Troubles de l’érection: en parler peut sauver des vies
Sujet tabou, il est aujourd’hui important de parler de panne au lit avec son médecin. Car ces troubles de l’érection ne sont pas anodins et cachent peut-être un problème plus important...
Dans nos sociétés où la performance sexuelle est valorisée, on oublie qu’après 40 ans, un homme sur trois est susceptible de présenter des troubles de l’érection, « que ce soit de manière minime, modérée ou sévère, de manière systématique ou situationnelle », précise Thierry Roumeguère, chef du service d’urologie au CHU Érasme (Bruxelles). Ces troubles peuvent empêcher d’avoir un rapport sexuel avec pénétration, ce qui génère parfois souffrance et insatisfaction chez les partenaires. « Cela reste quelque chose de tabou. Parfois, on préférerait que ce soit le médecin qui aborde la question mais les généralistes sont parfois eux-mêmes mal à l’aise car ils connaissent l’épouse, les enfants... ou n’ont tout simplement pas le temps. Résultat : personne n’en parle ! Il y a deux très bonnes raisons d’oser en parler : la première, c’est qu’il existe des traitements et la seconde, c’est de pouvoir mettre en évidence des pathologies sous-jacentes. »
Un facteur d’alarme
Depuis une vingtaine d’années, les troubles de l’érection sont en effet considérés comme un « facteur d’alarme » permettant de mettre en évidence un risque cardiovasculaire augmenté. « Quand on interroge les patients qui viennent de faire un infarctus et qu’on leur demande s’ils ont des troubles de l’érection, la majorité répond oui. Et, en général, ces troubles ont commencé deux à trois ans avant. Les études montrent même que plus l’atteinte des coronaires est sévère et étendue, plus la dysfonction érectile est sévère. Il existe donc un lien fort », détaille le spécialiste.
Il n’existe pas de limite d’âge pour prendre du Viagra.Après 40 ans, un homme sur trois peut présenter des troubles de l’érection.
En effet, les troubles érectiles témoignent le plus souvent d’un rétrécissement des vaisseaux. « Or le diamètre d’une artère coronaire est quatre fois supérieur au diamètre d’une artère caverneuse de la verge », précise Thierry Roumeguère. Les vaisseaux de la verge font donc partie des vaisseaux qui s’obstruent en premier. Les facteurs de risque de la dysfonction érectile sont d’ailleurs les mêmes que pour les maladies cardiovasculaires : âge, sédentarité, obésité, syndrome métabolique... « Plus rarement, la dysfonction érectile est la conséquence d’une chirurgie du petit bassin comme la prostatectomie radicale et/ou d’une radiothérapie ». Mais chez la majorité des patients, l’apparition de troubles de l’érection doit mettre la puce à l’oreille au sujet d’une possible pathologie non diagnostiquée comme une hypercholestérolémie ou un diabète.
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Des traitements efficaces
A la fin des années 90, une petite pilule bleue allait beaucoup faire parler d’elle : le Viagra (sildénafil). En favorisant le relâchement musculaire, cette molécule facilite l’engorgement des vaisseaux sanguins : elle est efficace chez 70% des patients présentant des troubles de l’érection. Des contre-indications existent mais elles sont rares : prise de dérivés nitrés (Trinitrine), présence d’une angine de poitrine ou survenue d’un infarctus moins de trois mois avant. Thierry Roumeguère déplore pourtant la persistance de craintes injustifiées et de fausses croyances.
« En dehors des contre-indications bien connues, le Viagra ne présente pas de risques pour le cœur. Il faut en effet rappeler que si le Viagra permet une augmentation du débit cardiaque, l’effort fourni par l’organisme pour obtenir une érection est équivalent à la montée de deux volées d’escaliers. Contrairement à l’idée que certains hommes s’en font, ce n’est pas une dépense d’énergie folle... », sourit le spécialiste. Il n’existe d’ailleurs pas de limite d’âge pour prendre du Viagra. « Tant qu’il y a du désir et qu’il n’existe pas de contre-indications, il n’y a aucune raison de ne pas le permettre et de ne pas traiter les plus âgés », insiste Thierry Roumeguère. Enfin, précisons que le Viagra n’est pas une pilule qui « donne envie ». « Il faut une stimulation, qu’elle soit psychique, physique, visuelle... » Ce médicament ne modifie donc aucunement la dynamique du désir au sein d’un couple, mais apporte seulement un « coup de pouce ».
Une solution pour chacun
Quand le Viagra ne fonctionne pas, il existe un panel d’autres solutions, comme le gel à base de prostaglandines, qui s’applique localement avant le rapport. Ou les injections intracaverneuses, également à base de prostaglandines. « Se faire une injection dans la verge peut rebuter pas mal d’hommes : c’est pourquoi on fait toujours les premières injections en présence du médecin », rassure Thierry Roumeguère. La pompe à vide, elle, consiste en un cylindre dans le lequel on place la verge et qui permet, grâce à un système d’aspiration, d’obtenir une érection qu’on peut maintenir une quinzaine de minutes grâce à un anneau posé à la base du pénis. Enfin, l’implant pénien est un cylindre pneumatique qu’on place par chirurgie à l’intérieur de la verge : grâce à une petite pompe semblable à un troisième petit testicule, la prothèse peut être gonflée et dégonflée au moment des rapports sexuels.
Co-auteur: Didier Dillen
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