Anne Vanderdonckt

Arnaques au goût du jour

Anne Vanderdonckt
Anne Vanderdonckt Directrice de la rédaction

Anne Vanderdonckt observe la société, ses évolutions, ses progrès, ses incohérences. Partage ses doutes, ses interrogations, ses enthousiasmes. Quand elle se moque, ce n’est jamais que d’elle-même.

Mais comment peut-on avoir aussi peu de discernement?! J’entends encore les réactions au récit de mes grands-parents, bronzés comme des Melo-Cakes, gênés comme des gamins annonçant à leur famille qu’un polichinelle s’est glissé dans le tiroir durant les congés annuels. Sur une aire d’autoroute, un monsieur très sympathique leur demande le chemin. Mon grand-père récupère sa carte routière qu’il installe sur le capot de la Capri (vous souvenez-vous de cette Ford splendidement déséquilibrée par un mini coffre à l’arrière et un interminable avant effilé?). Entretemps, ma grand-mère revient avec deux gobelets à café tirés du distributeur. On remercie, «mais je vous en prie, c’est un plaisir, bonne route». Bonne route vers le poste de police pour porter plainte, en effet: comme par magie, les valises s’étaient évaporées du coffre; les appareils photo, de la banquette arrière…

En dépit des coups du sort et des injustices, mes grands-parents étaient de ces gens qui continuaient à garder une confiance rose bonbon en l’humanité et à aider tout qui a eu moins de chance qu’eux. Leur argument massue: on voyait bien que c’étaient de braves gens. Variation: ils avaient l’air de braves gens pourtant.
Le pire, ce n’est pas d’être arnaqué, c’est d’avoir le sentiment de non seulement avoir été c*n, mais de surcroît d’avoir été pris pour un c*n. Aujourd’hui, les arnaques à l’ancienne, notamment sur les routes, subsistent. Régulièrement, les journaux nous mettent en garde à grand renfort de faits-divers contre les classiques qui se réinventent sans cesse.

Les arnaqueurs ont trouvé un nouveau terrain fertile, complexe et infini: internet

Hélas, le vivier de la naïveté humaine saupoudrée du sentiment que «ça n’arrive qu’aux autres» est vaste. Et hélas, les arnaqueurs ont trouvé un nouveau terrain de jeu fertile, complexe et infini: internet. Au point que les cambriolages classiques, avec leurs aléas, diminuent au profit d’une cybercriminalité moins risquée et terriblement lucrative.

Surtout que personne n’aille penser qu’il est tellement malin que ça ne lui arrivera jamais. Nous avons été nombreux, après suivi une formation en sécurité numérique, à cliquer en toute confiance sur un lien qu’on aurait dû considérer comme suspect. Message d’alerte. Il s’agissait d’un test du service informatique de l’entreprise. Vexant.

A côté des escroqueries grossières qui consistent à nous annoncer qu’un oncle d’Amérique nous lègue une fortune mais qu’il nous faut d’abord payer des frais, il y a tous ces mails qui nous font hésiter, car les escrocs s’adaptent vite et bien. Si certains arnaqués en perdent toute confiance en eux au point de se renoncer à internet, d’autres réagissent par une sorte de paranoïa. C’est ce qui est arrivé à l’un de nos collègues, qui s’étonnant de ne pas arriver à payer son voyage en ligne, après six coups de fil à l’agence et une longue conversation avec la banque s’est souvenu qu’il avait sécurisé cette carte de crédit de manière à ce que personne ne puisse payer par internet via son appli. Y compris lui, donc. Prudent, oui. Vexé, tout autant. Enervé comme une mouche dans un bocal, encore plus.

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