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« Je ne peux plus voir mes petits-enfants »: le rôle du médiateur en cas de disputes familiales

Si le dialogue avec vos enfants au sujet du droit de visite de vos petits-enfants ne donne rien, faire appel à un médiateur peut parfois aider à trouver une solution. Un tiers indépendant peut ouvrir une brèche dans des discussions qui se sont enlisées.

«Je reçois au moins cinq e-mails et trois coups de fil par semaine de la part de grands-parents qui ne peuvent plus voir leurs petits-enfants», raconte Eric De Corte, médiateur familial.

Garder les pieds sur terre

«Je dois parfois mettre fin aux illusions. Je ne tiens pas de statistiques, mais sur 10 tentatives de médiation, 3 seront effectivement engagées, dont à peine la moitié débouchera sur une solution. Dans les autres cas, l’enfant ne veut pas parler avec son père/sa mère des relations avec la petite-fille ou le petit-fils. Dans ce cas de figure, la procédure prend fin.

Les intéressés me posent alors souvent la question: pouvons-nous aller en justice? C’est une possibilité. Mais je leur fais part des conséquences. Même si le tribunal leur accordait un droit de visite, une question demeure: quelle tournure prendra la relation avec leur enfant Et surtout: veulent-ils mettre leurs petits-enfants dans une position difficile? Car c’est tout sauf évident pour eux. Un ado m’a raconté que ses parents ne lui donnaient pas d’argent de poche s’il se rendait chez ses grands-parents. C’est navrant. Sur le plan juridique, un enfant de moins de 12 ans peut demander à être entendu par le juge. Mais combien le font vraiment? Et à partir de 12 ans, ils ont le droit d’être entendus, mais cette possibilité n’est que rarement exploitée.»

Les grands-mères à l’initiative

«Ce sont très souvent les grands-mères qui me contactent par e-mail, souligne Eric De Corte. Je commence par les appeler pour me faire une idée précise de la situation. Souvent, ces échanges sont très émouvants. Les raisons pour lesquelles les grands-parents ne peuvent plus voir leurs petits-enfants sont très diverses. C’est souvent lié à des séparations. Mais parfois, le comportement des grands-parents est en cause et les enfants ont d’excellentes raisons de couper les ponts. Les parents trouvent parfois que les grands-parents sont trop permissifs, ce qui nuit à l’intérêt de leur enfant. Dans ce cas aussi, nous tentons d’amorcer le dialogue et de trouver un compromis.

Les grands-parents me demandent souvent de prendre contact avec leur enfant. J’avais l’habitude de refuser par principe, parce qu’on peut immédiatement passer pour quelqu’un de partial. Même si, bien sûr, ce n’est pas le cas. En fait, un médiateur est doublement partial: il écoute les deux parties et montre son engagement. Lorsque j’appelle l’enfant, je lui demande s’il serait prêt à discuter avec moi, comme tiers indépendant, et ses parents. Parfois, nous sommes également appelés à jouer le rôle de médiateur dans le cadre d’un procès. C’est alors le juge qui oriente la famille vers nous. Dans ce cas, il est plus facile de téléphoner à l’enfant parce qu’il sait de quoi il s’agit.»

Sur le plan juridique, un enfant de moins de 12 ans peut demander à être entendu par le juge.

Pas de scénario planifié

«Il n’existe pas de scénario planifié pour la médiation. Je ne propose pas d’accompagnement individuel ni d’entretiens de prise de contact. J’ai immédiatement une conversation avec tous les intéressés. Parfois également avec les petits-enfants à part si les parents sont d’accord. Un seul entretien est parfois suffisant. Un deuxième a souvent lieu après que chacun a eu le temps d’y réfléchir. Un troisième entretien est très rare et je n’en ai jamais eu de quatrième.

En tant que médiateur, je ne peux pas proposer de solution, mais je facilite la discussion. Je reformule, donne des explications et sonde les possibilités. Je me renseigne sur le problème exact. Quel est l’intérêt commun? Un jour, j’ai posé la photo du petit-fils sur la table et j’ai dit: voilà de qui il est question. Je ne suis pas psychologue, mais je tente d’amorcer le dialogue.

Communiquer, c’est bien plus que parler! Il faut aussi faire attention à la façon d’aborder un sujet. La manière dont vous transmettez le message est importante. Si vous répétez sans cesse le même schéma, votre interlocuteur se retrouve coincé. Mieux vaut répondre par une question: «Si je comprends bien, vous voulez dire ...» Ainsi, l’autre partie peut confirmer, réfuter, reformuler.

En tant que médiateur, il est primordial de ne pas passer pour un accusateur. Je ne demanderai jamais à un parent s’il se rend bien compte de ce qu’il enlève à son enfant. Bien que je sois moi-même convaincu de la valeur inestimable des grands-parents, je ne poserai jamais la question en ces termes, mais plutôt de la manière suivante: Qu’est-ce que cela pourrait apporter à votre enfant s’il pouvait voir ses grands-parents? Cette question n’est pas menaçante.»

Un engagement moral

«Si un compromis se dégage, je le note sur papier. Il n’a aucune valeur juridique, car vous ne pouvez pas forcer les parties à respecter un tel accord. Mais coucher les accords sur papier peut être utile. Il s’agit d’un engagement moral.

Parfois, il s’agit d’un accord concret pour effectivement permettre aux grands-parents de voir les petits-enfants, parfois il s’agit simplement de parents qui ne refusent plus catégoriquement mais qui veulent en discuter davantage avec leurs enfants. Je leur demande alors si ma présence serait bénéfique lors de cet entretien.»

Combien ça coûte ?

«Nous facturons 120€ par heure d’intervention. Généralement, les grands-parents et le(s) parent(s) se partagent la note. Si vous faites appel à un médiateur agréé, ce montant est pour actuellement exempté de TVA.»

Les accords que je consigne sur papier n’ont aucune valeur juridique. Vous ne pouvez pas forcer les parties à respecter l’accord. Il s’agit d’un engagement moral.

Conseils pour réussir une médiation

• Préparez-vous! Fixez vos attentes minimales et maximales. Qu’est-ce qui est possible pour vous, qu’est-ce qui ne l’est pas? Quel type d’accord êtes-vous prêt à accepter? Ne commencez pas tout de suite par énoncer vos attentes minimales, car vous n’aurez plus de marge de manœuvre par la suite.
• Ne laissez pas les émotions prendre le pas sur la raison. Ne proférez pas de menaces en évoquant le recours à un avocat.
• Ne comblez pas les silences par des paroles.
• Ne proférez pas d’attaque personnelle.
• N’acceptez pas des choses sur lesquelles vous n’êtes pas du tout d’accord.
• Réfléchissez à ce que vous allez dire, mais également à ce que vous n’allez pas dire.

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