Vers un autre partage de la succession
Notre droit successoral protège la famille proche. Les parents éloignés et les amis, s’ils reçoivent un legs, se trouvent dépouillés de la majeure partie tant les droits de succession sont élevés. Mais cela pourrait changer.
Dans le Plus Magazine n° 309 de novembre 2014, le Juriservice répondait aux questionnements d’un couple nonagénaire. Leur fils étant décédé depuis plusieurs années, ce couple de Wallonie avait du même coup perdu tout contact avec leur belle-fille et leurs petits-enfants. Seuls des amis, devenus des proches, prennent encore soin d’eux aujourd’hui. Tout naturellement, le couple voulait leur laisser ses biens. Mais...
La loi protège les proches
Il n’est pas possible de laisser la totalité de ses biens à des amis. Notre droit successoral protège les proches du défunt, c’est-à-dire le conjoint ou cohabitant légal et les héritiers en ligne directe (enfants et parents du défunt). Cette protection consiste en une » réserve » ou part de la succession dont ils ne peuvent pas être privés. Au niveau des enfants cette part est de oe de la succession s’il y a un enfant, 2/3 de la succession s’il y a deux enfants et de la succession s’il y a trois enfants ou plus. Dans le cas du couple ci-dessus, le fils étant décédé, ce sont ses enfants qui recueilleront la part qui lui revenait et se la partageront.
Ce qui reste de la succession est la quotité disponible qu’on peut léguer par testament à qui on veut. Avec un handicap qui est de taille : pour ceux qui héritent dans la catégorie » autres personnes » (des amis notamment), les droits de succession sont (fort) élevés. À moins de procéder par donations de son vivant, il n’y a qu’un moyen de compresser les droits de succession : désigner autant de légataires que possible (les amis, mais aussi leurs enfants, par exemple). Les parts respectives seront plus petites et donc, les droits de succession aussi, puisqu’ils sont calculés séparément sur chaque part individuelle. Attention : cette solution n’est applicable qu’en Wallonie. En Flandre et à Bruxelles, selon un système d’imposition cumulée qui s’appelle la globalisation, les droits de succession sont calculés sur la somme de toutes les parts nettes, puis répartis entre les différents légataires selon la part qui leur revient.
Ou bien, il faut recourir à certaines constructions successorales comme le legs en duo : il consiste à léguer une somme à une association et une autre à un ami, par exemple. L’association paie la totalité des droits de succession, c’est-à-dire les droits sur la part qu’elle reçoit et les droits sur la part de l’autre légataire. Avantage : si elle paie les droits de succession de l’autre bénéficiaire au tarif normal, elle ne paie que des droits de succession réduits sur sa propre part : 7% en Wallonie, 12,5% à Bruxelles et 8,5% en Flandre si elle a reçu l’agrément fédéral ou 6,6% pour une fondation d’intérêt général.
Vers un changement
Une proposition de loi a été déposée fin 2014 au niveau fédéral par des députés Open VLD. Sur le fond, cette proposition rejoint celle qui existait déjà sous le précédent gouvernement, mais qui n’a pas été votée à l’époque. Elle vise, non pas à supprimer la part réservataire des enfants, mais à la réduire : la part réservataire de tous les enfants – quel que soit leur nombre – serait égale à la moitié de l’héritage. La quotité disponible serait donc, elle aussi, de 50% de l’héritage afin » d’accorder aux parents plus de liberté pour décider eux-mêmes de la transmission de leur patrimoine après leur décès, sans trop d’ingérence du législateur. «
À suivre...
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