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Ça gratte, ça démange, ça fait mal... Oser parler de l’inconfort anal

Démangeaisons anales, hémorroïdes, incontinence fécale... Tant de problèmes qu’on n’aborde pas facilement avec son médecin. Il est pourtant possible de guérir ou du moins de soulager la plupart de ces symptômes.

Les médecins généralistes confirment que de nombreux patients trouvent toujours délicat de partager ce genre de symptômes. Le Dr Bart Van Geluwe, chirurgien abdominal (AZ Groeninge), est confronté chaque jour à des patients qui ont honte de leurs symptômes et qui souffrent inutilement pendant des années parfois. Il plaide pour une plus grande franchise et une meilleure compréhension du fonctionnement de l’anus. C’est que le sujet suscite l’intérêt! . Le terme « hémorroïde » arrive en effet en cinquième place des recherches effectuées quotidiennement sur Google en matière de santé.

1. Les hémorroïdes

Les hémorroïdes sont la première chose à laquelle on pense en cas de sensation désagréable autour de l’anus. Selon les estimations, trois adultes sur quatre en souffrent tôt ou tard. Elles causent des symptômes comme des pertes de sang, des douleurs, des démangeaisons, une sensation de brûlure lors de la défécation et elles peuvent sortir de l’anus.

« Il est important de savoir que tout le monde a des hémorroïdes internes. Ce sont des poches riches en vaisseaux sanguins nécessaires pour fermer hermétiquement le canal anal, permettant d’éviter l’incontinence. Lorsque les selles sont évacuées, les poches sont vidées, puis elles se remplissent à nouveau pour fermer le passage », explique le Dr Bart Van Geluwe.

Les hémorroïdes peuvent causer des problèmes pour toutes sortes de raisons. Par exemple une grossesse, une prostate volumineuse qui exerce une pression, une diarrhée chronique, une opération au niveau de l’anus, une perte de force due à l’âge ou un sphincter affaibli. « Par pudeur, on hésite à se rendre chez le médecin généraliste, sans parler de la gêne à se soumettre à un examen anal. Cela fait perdre un temps précieux, étant donné qu’il faut toujours traiter des hémorroïdes qui occasionnent une gêne. Et mieux vaut le faire au début, donc au plus tard deux à trois mois après le début des symptômes. »

Prévention et traitement

Les hémorroïdes sont réparties en quatre stades en fonction de leur taille et du désagrément causé. Des symptômes bénins (stade 1) aux hémorroïdes qui sortent continuellement de l’anus et provoquent des douleurs quotidiennes et des pertes de sang (stade 4).

« À un stade précoce, un traitement local est possible en appliquant une pommade anti-inflammatoire et décongestionnante et en adoptant un régime adapté riche en fibres qui garantit des selles molles. À l’instar des douleurs dentaires, la prévention reste la meilleure option. Pour éviter d’être constipé, ne remettez pas un passage aux toilettes lorsque le besoin se fait sentir. Essayez de limiter le temps passé aux toilettes. La défécation doit être terminée en deux minutes. Lire ou utiliser son smartphone aux toilettes est une très mauvaise habitude. »

Il est possible de traiter les hémorroïdes plus petites en injectant une substance qui les fait rétrécir. Un traitement tout à fait indolore étant donné que la muqueuse n’a pas de récepteurs de la douleur. Des résultats similaires peuvent être obtenus par une ligature élastique, une thérapie par infrarouge ou un traitement au laser. « Dès que les hémorroïdes sont trop grosses, la seule possibilité est l’opération visant à rétrécir les hémorroïdes ou les remonter. Une telle intervention s’accompagne naturellement de risques de complications. »

2. Les démangeaisons anales

Il est difficile de savoir avec précision le nombre de personnes souffrant de démangeaisons anales étant donné que tout le monde ne consulte pas pour y remédier. « Nous pensons que 5% de la population en souffre, les hommes plus souvent que les femmes. Si vous éprouvez régulièrement une gêne ou si ces démangeaisons perturbent votre sommeil, consultez un médecin. » La cause peut être identifiée dans 75% des cas.

« Les raisons peuvent être très nombreuses, ce qui peut compliquer l’approche du problème des démangeaisons anales. En tant que médecin, on doit jouer les détectives et rechercher les coupables. Il s’agit souvent d’une irritation cutanée sous-jacente, par exemple un changement de produit de lessive, ou parfois un manque d’hygiène. L’inverse est toutefois plus fréquent: les démangeaisons sont dues à une hygiène trop stricte. Cela peut provoquer de petites fissures et, combinées à des résidus de savon ou à des lingettes humides parfumées, elles peuvent entraîner un eczéma de contact et des démangeaisons au niveau de l’anus. » Chez une personne souffrant de démangeaisons anales sur cinq, elles sont provoquées par des hémorroïdes internes. En outre, des maladies cutanées comme un psoriasis ou un eczéma peuvent être à l’origine du problème ainsi que des médicaments agissant au niveau de la peau.

Tout ce qui crée une humidité excessive autour de l’anus est une source potentielle de démangeaisons. Comme une marisque (repli de peau autour de l’anus), une fistule, une diarrhée, une infection fongique, une incontinence fécale, ainsi qu’une transpiration abondante ou des sous-vêtements synthétiques.

« De nombreuses personnes s’imaginent avoir des oxyures (vers parasitaires) qui peuvent être une source de démangeaisons si des enfants sont atteints de cette infection à la maison, mais cela semble peu probable dans les autres cas. Dans environ un quart des cas de démangeaisons anales, aucune raison réelle ne peut être identifiée. »

Prévention et traitement

Il n’existe pas de solution miracle pour toutes les formes de démangeaisons anales. Le traitement dépend de la cause, mais une règle prévaut pour toutes les démangeaisons: ne grattez jamais! Cela soulage l’inconfort pendant un certain temps, mais aggrave ensuite les démangeaisons et donc l’envie de se gratter, ce qui fait que la peau s’épaissit et s’abîme.

« Pour briser le cercle vicieux et soulager les démangeaisons, il faut sécher la région anale à l’air tiède ou rincer l’anus à l’eau tiède. Ces stimuli mécaniques atténuent la démangeaison sans l’aggraver. » Il faut éviter une hygiène excessive, comme l’utilisation de lingettes humides ou de savon. Après la douche, mieux vaut tamponner la région anale que la frotter pour la sécher.

Lire ou utiliser son smartphone aux toilettes est une mauvaise habitude.

Une pommade à l’oxyde de zinc peut offrir un soulagement en cas d’irritations de courte durée. Vous pouvez également appliquer une compresse sur l’anus et la changer après chaque passage aux toilettes, cela permet de garder la zone bien sec.

« De nombreuses personnes essaient toutes sortes de pommades de leur propre chef, avec des résultats souvent variables ou temporaires. En outre, les pommades peuvent provoquer des démangeaisons en raison de la présence de certaines substances. Dans un tel cas, mieux vaut arrêter tous les traitements et se contenter de soulager les démangeaisons afin que la peau puisse guérir et reprendre à zéro la recherche d’un traitement adapté. Les démangeaisons anales requièrent parfois un traitement de longue durée. »

Si tous les traitements échouent, un tatouage bleu est appliqué dans la région de l’anus, ce qui détruit les terminaisons nerveuses et stoppe ainsi complètement les démangeaisons.

3. La fissure anale

« La fissure anale se reconnaît très rapidement, car elle se traduit par une douleur aiguë, presque insupportable, à chaque passage aux toilettes et elle persiste longtemps. Il ne faut pas la confondre avec des petites fissures ou craquelures dans la peau de l’anus à cause de selles trop dures ou de frottements trop forts avec le papier-toilette. Une fissure est une déchirure de la muqueuse, généralement à la suite d’une pression prolongée. »

Prévention et traitement

Il faut traiter une fissure dans un délai de six semaines pour un traitement optimal. En effet, en raison de l’importante douleur ressentie à chaque passage à la selle, le sphincter interne peut compliquer le traitement. Pour protéger la plaie douloureuse, il se ferme, mais cela ne fait que rendre les selles plus dures et risque d’élargir la fissure. Les chances de guérison sont très élevées si on intervient rapidement en administrant des analgésiques, des laxatifs et une pommade qui améliore localement la pression sanguine dans l’anus et détend le sphincter (pommade au dinitrate ou au diltiazem). « Il est important de poursuivre le traitement assez longtemps pour que la fissure guérisse complètement et qu’aucune plaie chronique ne se développe. »

4. L’incontinence fécale

La cause d’une telle incontinence est généralement une combinaison d’un ou de plusieurs problèmes, tels que des selles molles, un sphincter défaillant et un rectum hypersensible qui déborde trop rapidement. Le rectum stocke les selles juste avant que les matières fécales ne quittent le corps, mais le diabète, la paralysie, la sclérose en plaques, et surtout des années de constipation peuvent entraîner une défaillance du rectum.

« Ce sont surtout les femmes qui sont touchées par l’incontinence fécale, en raison de leur anatomie et des accouchements. Le prolapsus rectal est une cause souvent mal connue. Il survient chez certaines femmes de plus de 60 ans, des années après l’accouchement ou après l’ablation de l’utérus. En raison de ce prolapsus, le rectum peut se tourner et descendre dans l’anus. Le sphincter pense qu’il reçoit le signal de l’arrivée des selles et se détend au mauvais moment, ce qui provoque des accidents. »

Prévention et traitement

La première étape consiste toujours à adapter son alimentation, en introduisant suffisamment de fibres et en évitant les aliments contenant de la caféine et du lactose, car ils accélèrent le transit intestinal. Si les selles sont trop molles, le lopéramide peut être utilisé pour les rendre plus fermes et moins fréquentes. « En outre, ce médicament améliore la pression au repos dans l’anus, de sorte que celui-ci se ferme mieux. Le psyllium riche en fibres est également efficace. »

Si vous n’osez pas sortir de peur d’avoir des pertes incontrôlées, vous pouvez également utiliser des bouchons anaux qui vous aideront à retenir vos selles tout au long de la journée. Ou vous pouvez procéder vous-même à un rinçage de l’intestin.

En cas de prolapsus rectal, une physiothérapie du plancher pelvien aide à renforcer le sphincter et à le rendre plus sensible aux signaux des selles.

Dans les cas de prolapsus sévère, la chirurgie peut être utile pour restaurer les caractéristiques anatomiques, par exemple en renforçant le sphincter ou en repositionnant le rectum dans l’espoir qu’il retrouve sa fonction, mais dans ce cas, il convient de peser soigneusement le pour et le contre.

Si ces interventions n’offrent pas de salut, il reste la neuromodulation sacrée, qui consiste à implanter une électrode au niveau du sacrum. Elle permet de traiter les pertes d’urine et l’incontinence fécale.

La fistule du Roi-Soleil

Dans les livres d’histoire, le patient le plus célèbre à avoir une fistule anale n’est autre que le roi Louis XIV. Lorsque la douleur devint insupportable, le monarque désigna un médecin pour le soulager, sans anesthésie bien entendu...

Comme le médecin n’avait jamais pratiqué ce genre d’opération, il s’est entraîné pendant six mois sur 75 mourants! L’opération du roi fut un succès et lui permit de recouvrer la santé. Grâce à cet exploit, le métier de chirurgien a été officiellement reconnu en France.

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