Assurance vie et divorce : un bas de laine pour deux ?

Beaucoup de personnes mariées ont souscrit une assurance vie ou bénéficient d’une assurance groupe via leur employeur. Mais quel est le sort de cette assurance et des primes versées lorsque le mariage se solde par un divorce ?

Contenu :

Séparation de biens
Régime légal
La loi esquivée
Comment partager ?

Une des classiques pierres d’achoppement en cas de divorce est de fixer le sort d’une assurance vie/groupe qu’un des époux avait souscrite ou dont il est le bénéficiaire. L’autre a-t-il droit à une part et si oui, laquelle ? Ces questions peuvent avoir des conséquences financières importantes.

Séparation de biens

Les conjoints mariés sous le régime de la séparation de biens ne rencontrent normalement aucun problème. Celui qui a souscrit l’assurance vie peut en changer le bénéficiaire et désigner ses enfants ou une tierce personne à la place de son conjoint. Il peut effectuer ce changement à n’importe quel moment et, par exemple, lorsque les difficultés sérieuses commencent à se faire sentir au sein du couple.

Le capital déjà versé ou encore en constitution dans le cadre d’une assurance vie/groupe revient intégralement au souscripteur sans qu’il doive aucune indemnité à son ex-partenaire. Cette règle doit cependant être nuancée si l’un des ex-conjoints a puisé dans ses avoirs propres pour investir dans l’assurance vie dont l’autre est le bénéficiaire.

EXEMPLE : Marie a souscrit une assurance vie dont elle est elle-même la bénéficiaire, mais son mari Pierre – avec qui elle est mariée sous le régime de la séparation de biens – paie une partie ou la totalité des primes. Lors du partage après divorce, Pierre a le droit de demander une compensation pour ce qu’il a investi dans les avoirs de Marie.

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Les affaires se compliquent en cas de mariage sous le régime légal (communauté réduite aux acquêts).

En ce qui concerne la désignation d’un bénéficiaire de l’assurance, la situation est comparable à celle de la séparation de biens : le souscripteur de la police peut désigner un autre bénéficiaire.

Selon la loi sur les contrats d’assurance terrestre, le capital d’une assurance vie/groupe revient à celui qui est le bénéficiaire (en cas de vie) de l’assurance, même si l’autre conjoint a participé au financement des primes. En cas de divorce, le conjoint bénéficiaire ne doit verser aucun dédommagement à l’autre, sauf si – compte tenu de leurs ressources respectives – il ou elle a puisé plus qu’il n’était raisonnable dans les biens communs pour s’assurer (à lui/elle ou au conjoint) de  » vieux jours sereins « .

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La loi esquivée

De nombreux juristes ont estimé la loi inéquitable. Les assurances vie sont de plus en plus recherchées comme formules d’épargne alors qu’avant, elles avaient principalement pour but d’apporter une protection financière à l’un des conjoints en cas de décès de l’autre. Les dispositions légales peuvent parfaitement avoir pour conséquence qu’un des conjoints qui divorce à 65 ans emporte une somme importante avec lui tandis que l’autre ne reçoit rien, même s’il a lui aussi épargné et contribué à payer l’assurance. L’affaire a fini par arriver devant la Cour d’arbitrage qui a jugé que la réglementation légale était contraire au principe d’égalité. Si les époux avaient investi dans des titres ou autres produits d’épargne, la communauté de ces biens n’aurait pas été contestée.

Mais, malgré l’arrêt de la Cour d’arbitrage, les dispositions légales n’ont à ce jour pas encore été adaptées. Ce qui se traduit en pratique par une belle insécurité juridique et de nombreuses questions. Lorsqu’une affaire est soumise au tribunal, le juge doit suivre le raisonnement de la Cour d’arbitrage ou lui soumettre à son tour le litige. Dans la plupart des cas, on suit la logique de l’arrêt et c’est la réglementation suivante qui prévaut.

En cas d’ assurance vie pure, rien ne s’oppose à ce que la totalité du capital revienne au bénéficiaire sans la moindre indemnité pour l’autre conjoint et ce, même si les primes ont été payées (à moins que les primes ne soient disproportionnées par rapport aux ressources). L’objectif d’une assurance vie pure est en effet de protéger le conjoint survivant en cas de décès de l’autre conjoint.

Il en va tout autrement lorsqu’il s’agit d’une assurance vie mixte. Dans le cas d’une telle police, le capital est libéré soit lorsque survient le décès, soit à une échéance préalablement fixée. L’assurance groupe est assimilée à ce type d’assurance. Les avantages liés à ces assurances vie/groupe tombent souvent dans le patrimoine commun.

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Comment partager ?

Se pose la question de savoir comment il faut répartir entre les ex-conjoints les avantages liés à une telle assurance lorsqu’ils se retrouvent dans les biens communs. Deux situations peuvent se présenter :

Si le capital a déjà été versé par la compagnie d’assurances, il sera tout simplement partagé entre les ex-conjoints lors de la liquidation-partage après divorce.

EXEMPLE Pierre et Marie sont encore mariés lorsque Pierre prend sa pension et qu’il touche le capital de son assurance groupe. Cette somme fait partie des avoirs communs et, s’il y a divorce plus tard, elle sera divisée entre les ex-époux.

Mais il est fréquent que le versement n’ait pas encore eu lieu au moment de la dissolution du mariage.

EXEMPLE Lorsqu’il divorce, Pierre a 50 ans et travaille. Le capital de son assurance groupe ne lui a évidemment pas encore été versé.

Dans ce cas, il faut faire une distinction entre le droit au versement lui-même et la valeur patrimoniale. Le droit au versement revient à l’époux ayant droit (Pierre). La valeur patrimoniale (le capital de l’assurance groupe) fait partie des biens communs.

On demande alors à l’assureur d’établir la valeur de rachat de l’assurance. Autrement dit, il vérifie le capital déjà constitué et le montant que devrait verser la compagnie si l’assurance s’arrêtait à ce moment-là. Pierre devrait, par exemple, toucher 100.000 ? à ses 65 ans et le capital déjà constitué s’élève à 30.000 ?. Marie peut prétendre à la moitié du capital déjà constitué, soit 15.000 ?, diminué des charges fiscales. Elle n’est donc plus concernée par le capital restant à constituer.

Si le rachat de l’assurance n’est pas possible (ce qui est souvent le cas de l’assurance groupe), la valeur de rachat doit être fixée arithmétiquement. Cette valeur de rachat tombe dans les biens communs et fera partie des actifs à partager : les 30.000 ? sont ajoutés aux biens communs qui seront divisés au moment du divorce.

Une alternative : faire attendre la personne non bénéficiaire (Marie) qui ne touchera sa part qu’au moment où le capital sera versé au bénéficiaire, c’est-à-dire à Pierre lorsqu’il aura 65 ans. En attendant, Marie sera détentrice d’une créance qu’elle pourra faire valoir au moment du versement effectué par la compagnie. Si cette solution est moins fréquente, elle est pourtant plus avantageuse fiscalement.

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