Comment gérer le partage d’un bien quand il y a plusieurs héritiers
Frères et soeurs, par exemple, héritent ensemble de leurs parents. Qu’ils le veuillent ou non, ils deviennent ainsi copropriétaires de biens comme une maison, un portefeuille d’investissements, des oeuvres d’art, etc. Comment partager ces biens?
Lors de l’ouverture d’une succession, il est rare de ne pas y retrouver au moins un bien immobilier (maison, appartement, terrain). S’il y a plusieurs héritiers, vous en devenez copropriétaires en indivision. Pour toujours ou est-il possible de sortir d’indivision? Et cette copropriété peut-elle poser problème fiscalement si vous achetez vous-même un bien immobilier?
La copropriété
Il est question de copropriété quand plusieurs personnes possèdent un droit de propriété sur un même bien (ou ensemble de biens), sans qu’aucun d’entre eux ne puisse faire valoir un droit exclusif sur une partie de ce bien. Ces personnes sont copropriétaires et le bien qu’ils possèdent ensemble leur appartient en indivision.
En tant que copropriétaire, vous n’avez aucun droit de propriété sur une certaine partie du bien. Chacun ne possède qu’une part (fraction) abstraite et mathématique. Si vous êtes trois et que vous possédez une maison en indivision, vous avez chacun une part non attribuable d’un tiers de la totalité de cette maison. Vous ne pouvez donc pas dire: l’héritier X a le grenier, Y les chambres et la salle de bains et Z le salon et la cuisine. En outre, il est important que vos droits sur le bien soient de même nature. Par exemple, il n’y a pas d’indivision entre un usufruitier et un nu-propriétaire, car ils n’ont pas les mêmes droits sur le bien.
On distingue trois types de copropriétés: volontaire (vous achetez par exemple une maison avec une autre personne), forcée (vous achetez un appartement dans une copropriété) ou « ordinaire » (sans le demander devenez copropriétaire d’un bien avec d’autres personnes).
La sortie d’indivision
En tant que copropriétaire, vous n’avez pas souhaité cette indivision. D’où le sacrosaint principe: nul n’est tenu de rester en indivision. Si vous souhaitez sortir d’indivision et que les autres copropriétaires refusent de coopérer, vous devez introduire une demande de partage devant le tribunal. Il n’y a pas de délai de prescription et vous n’avez pas à justifier votre demande. Toutefois, vous pouvez convenir avec les autres copropriétaires de rester en indivision pendant un maximum de cinq ans. Ensuite, vous pouvez à nouveau renouveler le pacte pour une période de cinq ans.
Le partage des frais
Tant que la maison n’est pas partagée, vous devez supporter ensemble les frais d’entretien et le précompte immobilier. En tant que copropriétaire, vous pouvez y vivre seul, mais en théorie seulement dans votre part. Comme ce n’est pas vraiment possible en pratique, vous devrez verser à vos copropriétaires une indemnité d’occupation pour la jouissance exclusive du bien lors du partage. Concluez des accords clairs à ce sujet.
Comment procéder?
Comment mettre fin à l’indivision sur une maison? Soit vous décidez de la vendre et de partager le produit de la vente entre vous. Soit vous êtes d’accord qu’un ou plusieurs copropriétaire(s) reprenne (ent) la maison. En tant que partie acquéreuse, vous devez alors racheter la part des autres en leur versant une somme d’argent. Les droits d’enregistrement sont plutôt favorables. Les droits de partage sont en effet beaucoup plus faibles que pour une acquisition. Pour un bien situé en Flandre, les droits de partage sont de 2,5% ; dans les autres Régions, ils sont de 1%.
Ce taux peut être appliqué sur la valeur de la part rachetée ou sur la valeur totale du bien. Si, après la transaction, il y a toujours indivision entre certains copropriétaires, les droits sont calculés sur la valeur de la part rachetée. Ainsi, si à la suite d’un héritage, Isabelle, Pierre et Evelyne possèdent chacun 1/3 d’une maison de 300.000€, et qu’Isabelle cède sa part indivise à Pierre et Evelyne, qui restent ensemble en indivision, pour 100.000€, les droits de partage seront calculés sur ces 100.000€.
Si, après l’opération, l’indivision cesse, les droits de partage sont déterminés sur la base de la valeur totale du bien. Ainsi, si Isabelle et Pierre cèdent leur part pour un total de 200.000€ à Evelyne, les droits de partage sont calculés sur 300 000€ et non sur le montant de la transaction de 200.000€. Si vous ne parvenez pas à vous entendre sur la manière de sortir d’indivision et que l’un d’entre vous y tient vraiment, il devra aller au tribunal. Le juge désignera ensuite un notaire qui sera chargé de la vente du bien.
Vente à un prix supérieur à celui déclaré
Si vous héritez ensemble d’un bien immobilier, la valeur vénale doit être renseignée dans la déclaration de succession et vous devez payer des droits de succession sur cette valeur. Mais que se passe-t-il si, après le dépôt de la déclaration, la maison est vendue à un prix supérieur à celui que vous avez déclaré? Les règles diffèrent d’une Région à l’autre.
En Région de Bruxelles-Capitale et en Wallonie, les copropriétaires peuvent décider d’évaluer eux-mêmes le bien et risquent un redressement s’il est vendu à un prix supérieur dans les deux ans. Ils doivent alors payer des droits de succession complémentaires ainsi qu’une amende lorsque le manque à gagner est égal ou supérieur à 1/8 de la valeur du bien. Cette amende est en principe égale au montant des droits de succession complémentaires dus, mais elle est automatiquement réduite par l’administration fiscale selon un barème déterminé par arrêté royal.
Dans ces deux Régions, il est également possible d’opter pour un système d’évaluation préalable. Dans ce cas, un expert estimateur est désigné, en concertation avec le fisc, avant le dépôt de la déclaration. Son estimation est contraignante tant pour les copropriétaires que pour l’administration fiscale. Une vente ultérieure avec une plus-value n’aura aucune conséquence.
En Flandre, il existe trois façons d’évaluer un logement. Vous pouvez estimer vous-même la valeur du bien. Si la maison est ensuite vendue à un prix plus élevé, le fisc peut contester l’évaluation dans un délai de deux ans, ce qui entraîne non seulement le paiement de droits de succession complémentaires, mais aussi, si la différence est supérieure à 10%, une majoration d’impôts dont le niveau dépend de l’importance de la différence.
Si un bien est vendu plus cher que l’estimation, le fisc peut la contester.
Vous pouvez éviter ce risque en n’évaluant pas vous-même le bien. Soit vous optez pour une « demande d’estimation contraignante », par laquelle l’administration fiscale flamande évalue elle-même la valeur du bien et utilise cette estimation pour le calcul des droits de succession. Cette procédure ne vous coûte rien et l’évaluation est contraignante pour le fisc. Si vous réalisez ultérieurement une plus-value sur la vente du bien, cela n’aura aucune incidence fiscale.
Soit vous faites faire une expertise. Vous choisissez alors un expert dans la liste des experts reconnus par l’administration fiscale flamande et lui demandez une estimation à vos frais. Vous pouvez ensuite décider d’utiliser ou non le rapport de l’expert pour remplir votre déclaration de succession. Dans l’affirmative, cette estimation est également contraignante pour le fisc flamand, de sorte qu’une plus-value lors d’une vente ultérieure ne posera pas de problème.
Qu’en est-il si vous achetez un autre bien?
Chaque Région offre certains avantages fiscaux lors de l’achat d’une habitation propre, mais il existe souvent une condition dite d’exclusion. Si vous avez hérité d’un logement en indivision et que vous achetez vous-même une maison, votre part indivise dans la maison héritée constitue-t-elle un obstacle d’un point de vue fiscal?
Dans la Région de Bruxelles- Capitale, les droits d’enregistrement sont de 12,5%, mais vous pouvez bénéficier d’un abattement de 175.000€ à condition que le prix de l’habitation ne dépasse pas 500.000€. Le montant de l’abattement est alors déduit fictivement du prix, de sorte que vous payez les droits d’enregistrement sur une base taxable réduite. Si vous achetez une maison de 400.000€ – 175.000€ d’abattement fiscal, vous payez 12,5% de 225.000€ au lieu de 400.000€. Pour bénéficier de cet abattement, vous ne pouvez pas déjà posséder la totalité en pleine propriété d’une autre habitation. La possession d’une part indivise ne constitue donc pas un obstacle à Bruxelles.
En Wallonie également, les droits d’enregistrement sont de 12,5%, sauf pour les maisons modestes pour lesquelles le taux est de 6% ou de 5%, et un abattement de 20.000€ est accordé. Ici aussi, vous ne pouvez pas posséder un autre logement en pleine propriété en totalité, mais la possession d’une part indivise ne pose pas de problème. En Flandre, depuis le 1er janvier 2022, vous pouvez bénéficier d’un taux réduit de 3%, au lieu de 12%, si vous ne possédez pas la totalité d’un autre logement ou un terrain à bâtir en pleine propriété. Ainsi, si vous ne possédez qu’une part indivise dans un autre bien, cela ne pose aucun problème.
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