Investir en 2017 : pour le rendement, c’est par où svp ?
Les placements garantis à 100% ne rapportant presque plus rien, il faut investir autrement si on ne veut pas s’appauvrir ! C’est le conseil unanime des professionnels. Le petit épargnant suivra-t-il?
Pour ceux qui améliorent leur retraite grâce au produit de leurs placements, comme pour ceux qui se préparent à le faire, le constat est amer : le revenu généré par l’épargne classique est quasiment tombé à zéro. C’est spectaculairement vrai pour le carnet de dépôt, sur lequel les Belges ont amassé plus de 260 milliards d’euros. Même les généreux francstireurs de naguère ont dû baisser pavillon. Les épargnants ne détiennent par contre plus que pour 60 milliards d’obligations, contre plus de 100 voilà cinq ans. C’est qu’ici aussi, on tend vers zéro. Quant au rendement offert par les assurances vie, il fond comme neige au soleil. Or, elles totalisent quelque 300 milliards. Les Belges voient donc deux tiers de leur patrimoine financier non-professionnel les trahir au niveau des revenus qu’ils en espéraient ! Alors, que faire ?
Risque ne signifie pas gros danger
» Le plus grand risque que court aujourd’hui l’épargnant, c’est de ne pas prendre de risque « , affirme Vincent Juvyns, un Belge qui est stratégiste chez JP Morgan, la grande banque américaine. D’autres professionnels s’inquiètent au contraire : les épargnants ne courent-ils pas le danger de mal mesurer le risque en question et, dès lors, d’en prendre trop ? La réponse à ce dilemme est double. Premier point : prendre un risque ne signifie pas courir un gros danger, mais simplement s’écarter des placements réputés tout à fait sûrs que sont les obligations d’État et le carnet de dépôt. A terme, on court ainsi peu de risques avec un bon panier d’actions belges. Moins qu’avec une obligation en devise exotique, par exemple.
Second point : pour limiter ce risque, il est impératif de suivre les marchés, de bien les connaître et, surtout, de diversifier ses investissements en mettant ses oeufs dans de nombreux paniers. Ce n’est pas nécessairement à la portée de tout un chacun. Conclusion : il s’impose plus que jamais de s’intéresser aux fonds et sicav proposés par les intermédiaires financiers. Les Belges l’ont du reste bien compris : ils en détiennent actuellement pour plus de 170 milliards, contre une bonne centaine à peine en 2011.
Souvent axées sur de tels fonds, plusieurs formules peuvent par ailleurs, tantôt limiter ce risque, tantôt garantir un certain rendement. À condition, ici aussi, de ne pas exiger une protection du capital à 100%. Accepter un » petit risque » est décidément inévitable ! Tour d’horizon des principales solutions que les banques proposent à l’investisseur souhaitant un placement avec revenu.
Aller voir ailleurs
Chez BNP Paribas Fortis, le produit aujourd’hui mis en avant a pour nom BNP Paribas L1 Multi-Asset Income. Ce fonds a séduit pas mal de Belges, puisque ces derniers représentent une bonne moitié du 1,7milliard d’euros rassemblé en Europe. On le comprend, car il offre imperturbablement un rendement de 4% environ par an, en dépit de la chute des rendements obligataires. Comment ? En trouvant sans cesse de nouveaux actifs, plus rentables, pour remplacer ceux qui ne rapportent plus grand-chose.
Un exemple : les obligations d’État de la zone euro ne représentent plus que 5% du portefeuille, contre 14% il y a trois ans. Quant aux crédits aux entreprises européennes de haute qualité, ils sont tombés à zéro, venant de 18%. » Pour remplacer ces actifs au rendement devenu trop maigre, nous avons investi dans des obligations américaines, émises par l’État et par des entreprises « , explique Bart van Poucke, le gestionnaire du fonds. Normal : les taux d’intérêt ont moins chuté là-bas qu’ici. Et si le dollar baisse face à l’euro ? Pas de souci : le fonds a » couvert » ses avoirs en dollar, une pratique courante chez les gros investisseurs. Il est par ailleurs investi en obligations à haut rendement et en immobilier coté, pour un peu moins de 15% du total, ainsi qu’en actions.
Les fonds maison...
Deutsche Bank propose également un fonds maison spécifiquement axé sur le rendement : Deutsche Invest I Top Dividend. Philosophie : quelque 80% du revenu global offert par les actions étant dû aux dividendes, le fonds investit essentiellement en actions payant un dividende élevé et relativement garanti pour les années à venir. Le rendement est ici plus faible, de l’ordre de 2,7%, le portefeuille pouvant par contre engendrer des plus-values. La banque investit d’autant plus volontiers en dollar, pour obtenir un rendement décent, qu’elle croit à sa hausse face à l’euro, confie le stratégiste Wim D’Haese.
Fonds maison spécifique aussi chez Axa, avec le Global Income Generation. Il a marché très fort en 2016 et on le comprend : il distribue un coupon trimestriel de 1,25 ? net, ce qui correspond à un rendement frisant les 5%. Tout en dégageant encore une petite plus-value, ce qui ne sera pas nécessairement le cas à l’avenir. Il détient plusieurs centaines d’actions et est très investi en obligations américaines : » En dollar, vous pouvez encore obtenir 6%, contre 3,5% à peine en euro pour la même qualité « , explique Pol Pierret, country manager d’AXA IM. La volatilité (synonyme de risque dans le vocabulaire financier) de ce fonds est par ailleurs faible.
... et les géants internationaux
Bien qu’elle développe ses propres fonds, Deutsche Bank est connue pour vendre aussi ceux des autres, notamment les grands noms anglo-saxons. Et ceci sans facturer de frais d’entrée, ce qui est rare. Pour le rendement, elle avance l’Invesco Pan European High Income Fund, surtout investi en Europe et en obligations. En lien avec son risque assez faible, le rendement est de l’ordre de 2,5%. Il est par contre de quelque 4,5% pour le Global Multi Asset Income de Fidelity, qui investit en valeurs un peu plus risquées. Knut Huys, senior manager des fonds de fonds chez Deutsche Bank Belgique, y ajoute le plus spécifique Pictet Global Emerging Market Debt, qui tire son rendement de 4% des obligations des pays émergents. Autre choix : le célèbre JP Morgan Global Income. Il investit à la fois en actions de qualité offrant un joli dividende et en obligations plus spéculatives, ce qui explique un rendement appréciable de 4,5 à 5%.
Ce géant incontournable est également proposé par Beobank (mais avec des frais d’entrée de 3 %), en raison de ses grandes qualités, explique Marc Danneels, patron des placements. Il en va de même du BGF Global Multi-Asset Income (classe A4G, pour être précis !), promu par le groupe américain BlackRock, le plus grand gestionnaire du monde. Investi pour moitié en obligations américaines, il offre un rendement brut de l’ordre de 5%.
La banque en ligne Keytrade prévient ses clients : les placements réputés défensifs – les obligations en euro en particulier – sont devenus un peu dangereux et il faut donc aller voir ailleurs. Dans le cadre du plan d’investissement Keyplan, elle aussi avance, et sans frais d’entrée, quelques grands fonds internationaux comme le Bond Euro High Yield AE de la famille Amundi, investi en euro, ou le Franklin Templeton Euro Government Bond Fund, encore plus défensif puisqu’investi en obligations d’Etat de la zone euro. De nombreuses options un brin plus audacieuses sont bien entendu aussi disponibles.
Que penser de tous ces fonds ? Un examen des chiffres révèle que la distribution de rendements parfois assez élevés ne s’est pas faite au détriment du capital : la valeur de la part a progressé au cours des dernières années. Même si les prochaines seront sans doute plus difficiles, voilà qui est pour le moins rassurant et relativise la notion de risque !
Pas de tabou pour le capital
Chez Belfius, on propose une solution différente. La banque part d’une réflexion patrimoniale plus globale, explique Marc Hainaut, responsable de la gestion des produits d’investissement : est-il absolument indispensable de maintenir son capital de départ ? Peur de manquer un jour ? Il suffit d’être raisonnable et de réaliser un bon calcul, pour être largement couvert. Tabou de l’héritage ? Pourtant, au moment du décès des parents, aujourd’hui fort tardif grâce à l’allongementde la durée de vie, les enfants n’ont généralement (plus) guère besoin de cet argent. Une donation plus précoce leur aura été autrement plus utile ! Ce n’est pas pour rien que cette pratique est beaucoup plus répandue que naguère et n’est plus l’apanage des familles très aisées.
Osons donc un peu grignoter notre capital en cas de besoin. Belfius propose à cette fin le Rent Plan, dont le principe est simple : le client détermine le revenu qu’il souhaite obtenir à intervalles réguliers et il investit son capital dans des fonds. Si nécessaire, la banque en vendra dès lors quelques parts – ou fractions de parts – pour obtenir le montant souhaité. Deux contraintes : il doit s’agir de fonds maison, 5 au maximum, et non soumis au précompte, pour simplifier la procédure. Belfius propose une approche analogue en assurance, appelée » Confort » et basée sur une police de branche 23.
Mais avec mesure...
Deutsche Bank avance une formule qui s’y apparente : la rente viagère sans abandon de capital. Ce dernier n’est pas garanti pour autant, cela va de soi. Le produit garantit par contre un revenu à vie. Base de calcul : le rendement fixé au moment de la souscription, qui est fonction de l’âge. Il est de 1,5% à 50 ans et augmente de 0,10% par année supplémentaire, explique Anthony Van Impe, responsable de la gestion des produits. Ainsi à 79 ans, âge limite pour souscrire, le rendement garanti à vie est de 4,40%. Et net, puisque ce produit d’assurance échappe au précompte mobilier. On a compris que la formule était à souscrire plutôt à 60 ou même 65 ans, le rendement n’étant guère séduisant avant cet âge.
Chez KBC aussi, on raisonne en termes de risque mesuré. La banque considère que le moment est venu pour l’épargnant de changer son fusil d’épaule, d’autant que les obligations en euro risquent à l’avenir de subir des moins-values. En clair, rendement est aujourd’hui synonyme d’une certaine prise de risque : actions, obligations d’entreprises et/ou en dollar. La banque propose dès lors aux investisseurs des fonds investis dans ces divers actifs, mais avec « surveillance du niveau plancher ». La formule consiste à fixer au départ un niveau de perte maximum : 5, 10 ou 15%. S’il est atteint, les positions sont vendues au profit de liquidités. Celles-ci seront évidemment réinvesties quand les marchés se redresseront.
En pratique
A l’exception du JP Morgan Global Income, il n’est pas facile de trouver le montant des coupons payés par les fonds. Insistez donc auprès de votre banquier pour les obtenir, de manière à vérifier le rendement annoncé ! D’autre part, dans le contexte actuel de rendements faibles, les frais d’entrée peuvent peser lourd. Négociez un maximum de 2%, puisque certains affichent 0% ! Quant aux » frais courants » annuels, qui comprennent la commission de gestion, ils ne devraient pas trop dépasser 1,5%. De nombreux fonds existent en versions de capitalisation (les revenus sont réinvestis) et de distribution, avec passage gratuit de l’un à l’autre. Idéal pour accumuler avant sa retraite et toucher un revenu ensuite. Avec paiement par trimestre ou même par mois.
Bon à savoir
Le revenu offert par un placement est (presque) toujours proportionnel au risque qu’il présente. Un placement très sûr n’est jamais fort rémunérateur. Cela vaut pour tout investissement à capital garanti, y compris dans l’assurance.
Une bonne diversification atténue très efficacement le risque de chaque poste individuel. Les grands fonds cités ici détiennent souvent plusieurs milliers d’actions et obligations différentes !
Il faut choisir entre rendement et plus-value. Un placement à rendement élevé n’offre en principe que des plus-values modestes.
Que conseiller à vos enfants ?
Le long terme est le plus sûr allié de l’épargnant : il diminue progressivement le risque présenté par les placements les plus rentables. Et finit même par l’effacer. Vous avez un horizon d’investissement de l’ordre de 20 ans, voire plus ? Parfait : c’est dans une telle position qu’un investisseur peut vraiment faire fructifier son patrimoine. A une condition : raisonner en fonction de cette durée.
Ceci n’est pas du court terme !
On conseille à tout le monde de disposer d’une » poire pour la soif » : un peu d’argent disponible pour faire face à un imprévu. Il est clair que cette épargne de précaution doit être placée de manière totalement sûre : compte courant, à terme, ou carnet de dépôt... même s’il ne rapporte presque rien. Idem pour le capital devant financer l’acquisition prochaine d’un logement : pas question de risquer une moins-value.
Il n’en va pas de même de l’argent épargné dans une optique de long terme. Cas exemplaire : la partie du patrimoine qu’un couple met de côté pour générer un revenu supplémentaire une fois à la retraite. Ou l’épargne progressive d’un enfant, dans l’optique d’un achat immobilier encore lointain. Pour ces capitaux-là, il serait contre-productif de se contenter du faible rendement offert par un placement hypersécurisé à court terme. Il faut se tourner vers des placements qui peuvent, certes, présenter un certain risque à échéance de quelques années, mais qui sont beaucoup plus rémunérateurs sur le long terme, comme l’immobilier et les actions.
Un peu... ou beaucoup plus ?
Le graphique à gauche illustre à quel point la Bourse a mieux performé que les obligations, en Belgique, entre 1900 et 2014. A l’issue de cette très longue période, un placement à court terme a perdu 30% de sa valeur, une fois l’inflation déduite, tandis qu’un placement en obligations a progressé de 60%, soit 0,4% par an. En actions par contre, l’appréciation annuelle fut de 2,7%, ce qui donne au total une multiplication de la valeur par 22. Les performances sont très supérieures au niveau mondial, et la différence beaucoup plus sensible, à savoir une multiplication par 8,4 pour les obligations et par 325 pour les actions ! On ne dispose pas de chiffres précis pour l’immobilier, mais les indications disponibles pointent une performance comparable à celle des actions. Quant on vise le long terme, on n’a pas besoin du revenu annuel généré par le placement et on peut dès lors le capitaliser, c’est-à-dire le réinvestir aussitôt dans les mêmes valeurs. Ceci entraîne un effet boule de neige. Très majoritairement investis en actions belges, les fonds d’épargne-pension ont ainsi offert un return (dividende + hausse de cours) moyen de 6,6% par an sur les 25 dernières années, sans retenir l’avantage fiscal. Un bon placement donc. On a compris qu’il y a cependant mieux encore : les fonds de capitalisation investis en actions internationales
Quelques actions en direct
Les actions offrent historiquement un rendement de dividende inférieur à celui des emprunts d’État. Si elles sont plus rémunératrices au total, c’est en raison de la hausse du cours, une plus-value qui n’existe pas du côté des obligations. Or, que constate-t-on aujourd’hui ? Que la Bourse offre un rendement très supérieur ! Pas seulement les » valeurs de rendement « , des actions connues pour cela, mais bien la Bourse dans son ensemble, une situation franchement exceptionnelle. Pas étonnant qu’on vous conseille de plus en plus souvent de ne plus hésiter à investir en actions. Soit via un fonds bien diversifié, soit en osant quelques choix personnels. L’investisseur prudent s’en tiendra toutefois aux actions présentant un risque objectivement assez faible, ce qu’on appelle des valeurs très défensives Tout le contraire des jeunes entreprises qui se lancent dans la biotechnologie !
L’épargnant qui passe des placements à revenu fixe (carnet, obligations...) aux actions souhaite certainement conserver un revenu assez stable. Il faut donc que le dividende actuel soit relativement assuré à un horizon de plusieurs années. Et pour éviter de payer deux fois le précompte mobilier sur le dividende, on s’en tiendra aux actions belges, notamment les 6 plus généreuses reprises ci-dessous. Le dividende est le dernier connu, en tenant compte du précompte de 30% qui sera appliqué en 2017. Attention : le maintien (parfois petite augmentation) de ce dividende est probable, mais jamais certain. Le rendement est calculé sur base du cours de début novembre.
Activité | Action | Dividende net | Rendement net |
Befimmo | Immobilier | 2,41€ | 4,7% |
Proximus | Télécoms | 1,05€ | 4,0% |
Confinimmo | Immobilier | 3,85€ | 3,7% |
Bpost | Poste | 0,91€ | 3,9% |
Ageas | Assurances | 1,16€ | 3,7% |
GIMV | Holding | 1,715€ | 3,6% |
Par Guy Legrand
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