Guy Legrand
Les taux vont-ils (enfin) remonter ?
L’année 2018 était à peine entamée que plusieurs voix s’élevaient : attention, cette fois ça y est, les taux d’intérêt vont grimper !
En réalité, voilà déjà trois ans qu’on entend cette mise en garde. Que faut-il dès lors en penser ? Première question : est-ce vraiment pour cette année ? Deuxième question : faut-il s’en inquiéter ? Car si une remontée des taux est le plus souvent présentée comme une menace, on n’est pas obligé d’y souscrire. Troisième question : est-ce un bien ou un mal ? Et surtout pour qui ?
Il est clair que le niveau actuel des taux d’intérêt est anormalement bas en zone euro. Ainsi, le rendement de l’emprunt d’Etat allemand à dix ans a fluctué entre 0 et 0,5 % à peine l’an dernier, contre 2 à 2,5 % pour son homologue américain. Aberrant ! Si les taux sont aussi bas de ce côté-ci de l’Atlantique, parfois même négatifs, c’est parce que la Banque centrale européenne (BCE) a suivi l’exemple de ses consoeurs en achetant massivement des obligations, et qu’elle continue à le faire. Or, de gros achats entraînent une hausse des prix, en finance comme au marché matinal. Pour les obligations, une hausse des cours signifie automatiquement une baisse des rendements. Et tel était le but de la BCE. Cette dernière cessera toutefois ses achats en automne prochain. Elle a également laissé entendre qu’elle pourrait, en cas de besoin, modifier sa politique plus tôt que prévu. Tout ceci rend fort plausible que les taux d’intérêt européens remonteront bel et bien en 2018.
Une remontée des taux d’intérêt est fort probable, mais elle sera très progressive.
Cela étant, faut-il s’en inquiéter ou s’en réjouir ? De très nombreux Belges opteront pour la deuxième attitude en songeant à leur carnet de dépôt, dont le rendement misérable est actuellement loin de compenser l’inflation. Il n’est pas certain qu’ils seront rapidement » dans le vert « , c’est-à-dire qu’ils obtiendront un taux supérieur à l’inflation, mais au moins la perte devrait-elle s’amenuiser. Bonne nouvelle aussi pour les détenteurs d’assurances vie, même si l’amélioration des rendements sera sans doute fort lente.
Une hausse des taux d’intérêt est par contre une mauvaise nouvelle pour les investisseurs en obligations, puisque ces dernières subissent automatiquement une moins-value temporaire. Les candidats à la propriété seront également confrontés à des taux hypothécaires plus élevés. Ni euphorie ni panique cependant au final car, sauf accident, le mouvement sera progressif et d’ampleur encore limitée cette année. Du reste, si cette hausse des taux d’intérêt paraît aujourd’hui inévitable, c’est aussi parce que la conjoncture économique est assez bonne. Or, un tel environnement rend une hausse des taux relativement indolore pour l’économie, y compris pour les placements en actions. Un véritable cercle vertueux ! Qui ne peut pour autant exclure un accident de parcours...
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