Partagez vos biens comme vous le voulez

Tous les conseils pour gérer votre succession comme vous voulez.

Contenu :

La réserve légale fixe les limites
Donner votre entreprise familiale

Assurer l’avenir d’un enfant handicapé

Les notaires rencontrent régulièrement parmi leur clientèle des parents qui, pour leur enfant handicapé, cherchent à s’écarter des règles successorales légales pour trouver une solution  » sur mesure « . Des familles à la tête d’une entreprise familiale où un seul de leurs enfants est actif peuvent aussi éprouver le besoin de prendre certaines dispositions qui s’écartent du partage légal. Il est possible encore que, même si tous les enfants ont démarré avec les mêmes atouts dans la vie, le mauvais sort se soit acharné sur l’un d’eux et que les parents veuillent corriger cette malchance en lui apportant un soutien financier supplémentaire. Situation regrettable, enfin, mais qui se rencontre : un enfant a rompu toute relation avec ses parents tandis que l’autre leur apporte toujours affection et soutien (matériel). Un  » testament-sanction  » fera alors la part des choses en déshéritant partiellement l’enfant avec lequel tout contact est perdu.

La réserve légale fixe les limites

Etablir un testament permet de s’écarter dans une plus ou moins grande mesure des règles légales de notre droit successoral. Jusque là, pas de problème. Mais celui qui fait un testament ne peut pas disposer tout à fait librement de ses biens. Il y a en effet des héritiers qui ne peuvent pas être privés d’une part légalement protégée de la succession, part appelée réserve ou part réservataire. Ces  » héritiers réservataires  » ne pouvant pas être écartés, il en résulte que, dans bien des cas, on ne peut disposer librement que d’une partie limitée de ses avoirs. Celle que l’on appelle  » quotité disponible « .

Bon à savoir Pour évaluer la réserve, il n’est pas seulement tenu compte des legs effectués par testament mais aussi des donations que vous auriez faites de votre vivant.

Qui a droit à une part réservataire ?

Le conjoint survivant a droit à une réserve. De même, les parents en ligne ascendante (parents, grands-parents,...) peuvent prétendre à une part réservataire. mais dans le cadre de ce dossier, c’est surtout la réserve des descendants du défunt qui nous intéresse.

Il faut tout d’abord savoir que ces héritiers réservataires n’ont droit à une part réservataire que s’ils apparaissent  » en ordre utile  » dans la succession. Ainsi, les petits-enfants ne peuvent pas prétendre à une réserve sur la succession de leurs grands-parents si leurs parents sont encore en vie. Ceux-ci, par contre, peuvent revendiquer leur réserve.

Par ailleurs, tous les enfants ont droit à une réserve, quelle que soit leur filiation pourvu qu’elle soit établie juridiquement : les enfants adoptés et les enfants nés hors mariage y ont donc droit aussi.

Enfin, il arrive que des petits-enfants héritent de leurs grands-parents parce que leur parent est décédé (juridiquement, on parle de représentation): dans ce cas, ils ont droit, dans le calcul de la réserve et de la quotité disponible, à la part qui aurait dû revenir à leur parent décédé.

Exemple Anne et Stéphane héritent de leur grand-père parce que leur père est décédé. Leur père avait deux frères qui sont toujours en vie. Anne et Stéphane se partagent la réserve de leur père décédé : ensemble, ils ont droit, au moins, à 1/4 de la succession de leur grand-père.

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Donner votre entreprise familiale

Lorsqu’un ou plusieurs enfants travaille(nt) dans l’entreprise familiale et pas les autres, il s’impose souvent d’en tenir compte dans la planification successorale et le partage de l’héritage. Et il n’est pas toujours simple de concilier les intérêts des  » actifs  » avec ceux des  » non actifs  » au sein de l’entreprise familiale, sans mettre en danger la continuité de l’entreprise elle-même. Cela revient à trouver un délicat équilibre entre leurs aspirations respectives. Les actifs voudront en général s’assurer le contrôle de l’entreprise et, si possible, un revenu supplémentaire pour le temps, l’énergie et le travail qu’ils investiront dans le développement de l’entreprise. Les non actifs attendent de leurs parents un traitement équitable, du moins dans la répartition des avoirs.

Via le droit des sociétés

Les solutions simples ont rarement cours ici du fait que le patrimoine de la société constitue bien souvent l’essentiel des avoirs privés. L’attribution pure et simple de l’entreprise aux enfants qui y sont actifs via un testament ou une donation, par exemple, sera dès lors presque toujours exclue car la quotité disponible de l’héritage serait largement dépassée. Il faudra souvent avoir recours à d’ingénieuses techniques élaborées autour des règles du jeu propre au droit des sociétés.

  • Lorsque l’entreprise familiale est exploitée sous le statut de SA ou de SPRL, on pourra envisager de transmettre la majeure partie des actions aux enfants actifs, soit par donation, soit par testament. Les statuts de la société devront donc comprendre des clauses assurant une sécurité de gestion à ces enfants actifs au sein de l’entreprise.

Par ailleurs, des accords clairs devront être pris au bénéfice des enfants non actifs en ce qui concerne le processus décisionnel lors de l’assemblée générale, la vente des actions et le partage des bénéfices. Il faut aussi créer la possibilité pour les non actifs de sortir de l’entreprise et de convertir leurs actions via un transfert aux actifs (voire, au pire, à des tiers).

  • Si l’entreprise familiale a la forme d’une entreprise individuelle, c’est encore plus difficile. Il n’est en effet pas possible de travailler à partir de la possession d’actions ni d’élaborer une structure basée sur un processus décisionnel de majorité contre minorité. En pareille situation, il faudra souvent chercher son salut dans ce que l’on appelle la technique du  » double acte « 

Exemple Supposons une famille comptant deux enfants : Luc et Bruno. Luc travaille dans l’entreprise familiale et souhaite continuer son exploitation. Son frère Bruno travaille ailleurs.

En première instance, les parents transmettent par donation l’entreprise à Luc et à Bruno en même temps, en indivision, chacun pour moitié. Ils reçoivent chacun une part égale de sorte qu’il ne puisse être question de désavantage pour l’un d’eux.

Ensuite, les enfants sortent tous deux d’indivision et Bruno va céder sa part indivise à son frère Luc.

Luc devient seul propriétaire de l’affaire familiale mais il devra bien évidemment verser à son frère une compensation financière qui sera égale à la moitié de la valeur de l’affaire. Pour ce faire, Luc a la possibilité de souscrire un emprunt auprès d’une banque, à moins que ce paiement ne soit aussi réglé au niveau familial. Luc pourrait, par exemple, rembourser (partiellement) Bruno en prenant moins dans les actifs de la succession lorsque les parents décéderont.

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Via une donation

Une technique de transmission d’une entreprise familiale qui permet de coupler des avantages fiscaux à d’intéressants effets sur le plan civil consiste à donner l’entreprise. Cette technique peut éventuellement s’inscrire dans la technique précédemment citée du double acte.

A quel taux ?

L’article 140bis du Code des droits d’enregistrement prévoit une réduction des taux des droits de donation à 3 % en Région bruxelloise, 2 % en Région flamande et 0 % en Région wallonne en cas de donation d’une entreprise. Il s’agit d’un taux unique, contrairement aux droits de donation ordinaires qui, eux, sont progressifs à deux titres : ils augmentent avec la valeur de la donation et en fonction du degré de parenté entre le défunt et l’héritier.

Cela représente, on le comprend aisément, une belle économie d’impôt surtout pour les patrimoines importants ou dans les cas où le lien de parenté est éloigné voire inexistant entre donateur et bénéficiaire.

Que donner ?

L’objet de la donation peut être une entreprise individuelle tout comme des actions d’une société dont le siège de direction effective est établi dans un des pays membres de l’Union européenne.

Dans les deux cas, l’activité doit avoir trait à une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole ou à l’exercice d’une  » profession libérale, ou une charge ou office « . La Région wallonne inclut aussi l’activité forestière. La donation d’actions de société de patrimoine ou de société holding est donc exclue.

Quelle protection sur le plan successoral ?

Lors de l’introduction des droits de donation réduits pour les entreprises, le législateur fédéral a apporté deux corrections dans les articles du Code civil qui concernent le droit successoral (et qui s’appliquent donc aux trois Régions puisque le droit civil est toujours une compétence fédérale) :

n les héritiers peuvent exiger leur part de biens mobiliers et immobiliers en nature (art. 826, Par.1). Il existe une exception à ce principe en ce qui concerne les biens qui bénéficient de l’avantage accordé à la donation d’entreprise. Ce qui résout le problème d’un éventuel partage en nature des actions de l’entreprise familiale entre les différents détenteurs.

n Pour garantir l’égalité entre les héritiers, les donations faites de son vivant par le défunt doivent être reprises dans la masse successorale et ce, à leur valeur au moment du décès du donateur (art. 922). Ici aussi, on s’écarte de ce principe lorsque les biens ont été donnés par donation d’entreprise. Ils seront repris dans la succession à leur valeur au moment de la donation. Ceci, pour éviter de priver le bénéficiaire des plus-values qu’il a lui-même réalisées par son activité à la tête de l’entreprise.

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Assurer l’avenir d’un enfant handicapé

Une des grandes préoccupations des parents d’un enfant handicapé est de lui assurer les meilleurs soins après leur décès. Ce qui met souvent ces mêmes parents devant un dilemme.

Est-il bien raisonnable de faire hériter un enfant handicapé d’une part importante de leurs avoirs ? Ainsi, le fait pour cet enfant de devenir, par héritage, propriétaire de certains biens peut entraver voire supprimer son droit à certaines interventions sociales. En outre, l’enfant en question a souvent moins besoin de disposer d’un patrimoine important que d’être assuré d’un capital déterminé qui servira à assurer son logement et les soins dont il a besoin et auquel s’ajoutera une petite  » rente  » périodique.

Le statut juridique d’un enfant handicapé peut en effet fortement varier d’un cas à l’autre. Certains sont sans statut juridique mais aussi, dans les faits, incapables mentalement de gérer un patrimoine. D’autres ont un statut (par exemple, minorité prolongée ou accompagnement par un administrateur provisoire).

Quel que soit leur statut, la gestion du patrimoine d’un enfant handicapé posera toujours problème à un moment ou l’autre (Peut-on vendre ? L’enfant handicapé peut-il lui-même faire une donation ? Qui gère le capital ? etc.).

Il est impossible d’analyser toutes les possibilités dans le cadre de cet article : chaque dossier est différent et demande une approche sur mesure.

Il sera souvent souhaitable d’intervenir par un testament qui attribuera la plus grande part de la quotité disponible au frère ou à la soeur de l’enfant handicapé. Il sera aussi souvent nécessaire de régler le problème de l’héritage des parents mariés en attribuant autant que possible au conjoint survivant. Ce qui peut se faire par une clause dans le contrat de mariage qui stipulera que l’enfant handicapé (ainsi que ses frères et s£urs) n’hériteront qu’au décès du parent survivant.

Le problème de la gestion des biens se résoudra souvent par le recours à des techniques par lesquelles l’héritage reviendra (quasi) exclusivement aux enfants valides mais qui, en contrepartie, attribueront périodiquement à l’enfant handicapé des avantages matériels et/ou des indemnités. Ce qui pourrait se faire, par exemple, par la technique de la rente viagère orchestrée ou non via une assurance vie.

La création d’une fondation privée peut apporter (une partie d’)une autre solution. Cette fondation aura pour objectif de consacrer une partie des avoirs aux besoins de l’enfant handicapé et ses dirigeants (bien souvent, les frères et/ou les soeurs) veilleront au respect de cet objectif.

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Le legs de residuo

L’enfant handicapé n’a bien souvent pas la capacité de gérer lui-même ses avoirs. Il est dès lors préférable de trouver un arrangement pour la gestion de la partie des biens des parents qui revient à cet enfant. Le legs de résiduo, quant à lui, apporte un intéressant avantage fiscal au frère ou à la soeur qui survivrait à l’enfant handicapé.

Qu’est-ce que c’est ?

Un legs de résiduo (ou fideïcommis de residuo en termes juridiques) permet à celui qui établit le testament (testateur) de désigner non pas une fois, mais deux fois des personnes à qui doivent revenir (successivement) ses biens. Celui qui établit un tel testament transmet (une partie de) ses biens à un héritier précis (légataire) appelé  » premier bénéficiaire  » (ou grevé). Celui-ci reçoit les biens et en demeure propriétaire jusqu’à sa mort. Mais au décès de ce premier bénéficiaire, ce qui reste des biens (residuo) ne va pas à ses propres héritiers mais à une autre personne (le  » second bénéficiaire  » ou appelé) qui avait été désigné par le testateur. Comme si cette deuxième personne héritait directement de celui qui a établi le testament, mais de manière postposée.

Quand est-ce intéressant ?

Parmi les techniques de planification successorale, celle du legs de residuo est souvent utilisée par les parents qui ont un enfant handicapé et qui veulent en quelque sorte  » récompenser  » celui ou celle qui en prendra soin.

Avantage fiscal

Outre d’être une technique de transmission des biens qui permet de s’écarter des règles successorales légales, le legs de residuo apporte aussi un appréciable avantage fiscal.

Le premier bénéficiaire (le grevé) va bien évidemment devoir payer des droits de succession calculés au tarif applicable au degré de parenté qu’il a avec le testateur, comme pour tout legs normal.

Au moment du décès de ce premier bénéficiaire, la personne qui hérite des biens en deuxième rang devra, elle aussi, payer des droits de succession sur ce qui reste des biens. Et c’est précisément ici que l’on peut réaliser une belle économie d’impôt en instituant un legs de residuo : les droits de succession dus sont calculés sur base du lien de parenté qui existait entre ce second bénéficiaire et le testateur (qui a, à l’origine, rédigé le testament transmettant ses biens à deux personnes successives). Le degré de parenté entre le premier et le second bénéficiaires n’entre absolument pas en ligne de compte.

Exemple Jean et Elise ont deux enfants : un fils, Pierre, qui est handicapé et restera célibataire, et une fille, Catherine, qui a elle-même deux enfants. Par legs de résiduo, Pierre hérite de la moitié des biens de ses parents. Ce qui, à son décès, restera de ces biens reviendra à sa soeur Catherine et ce, au taux de droits de succession applicable en ligne directe et non au tarif prévu entre frères et soeurs.

Bon à savoir Lors du second héritage, les droits de succession seront calculés sur base de la valeur des biens au moment du décès du premier bénéficiaire mais selon les taux qui étaient en vigueur au moment du décès du testateur. Si des modifications légales des tarifs interviennent entre-temps, elles seront donc sans incidence.

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En Flandre, un tarif réduit pour les personnes handicapées

En Belgique, les droits de succession sont réglés au niveau des Régions (Wallonie, Flandre et Bruxelles-Capitale) et le tarif applicable est celui de la Région où s’ouvre la succession.

Exemple Simon est venu s’établir à Bruxelles pour des raisons professionnelles mais ses parents habitent toujours en Flandre. A leur décès, Simon paiera des droits de succession calculés selon les taux applicables en Flandre.

Depuis le 1er janvier 2003, la Flandre accorde un abattement aux personnes gravement handicapée : l’importance du montant exonéré dépend de l’âge de la personne handicapée et du tarif auquel il est soumis. L’abattement s’élève à :

  • 3.000 ? pour un héritage  » en ligne directe, entre conjoints ou cohabitants « 
  • 1.000 ? dans les autres cas.

Ce montant de base doit être multiplié par un facteur lié à l’âge de l’héritier.

Le droit à l’abattement doit être prouvé par une attestation ou une déclaration fournie par une institution ou un service qui a la compétence pour établir le handicap.

Exemple Pierre a 45 ans et est lourdement handicapé. Il hérite 85.000 ? de son père qui résidait en Flandre. Comme il s’agit d’un héritage en ligne directe, il a droit à un montant exonéré de 3.000 ?, abattement qu’il faut multiplier par 14, facteur applicable à sa tranche d’âge.

Il bénéficie donc de l’exonération sur un montant de 3.000 ? x 14 = 42.000 ? et ne devra payer des droits de succession que sur 43.000 ? (85.000 – 42.000).

En Flandre, un héritier en ligne directe paie 3 % de droits de succession sur la première tranche jusque 50.000 euro. Pierre devra donc payer 3 % sur 43.000 ?, soit = 1.290 ?.

Sans l’abattement, il aurait dû payer : (50.000 ? x 3 %) + (35.000 ? x 9 %) = 4.650 ? !

L’exonération accordée en Flandre lui fait donc économiser :

4.650 ? – 1.290 ? = 3.360 ?.

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