Guy Legrand
Un lien entre l’espérance de vie et le niveau de revenu ?
Santé et prospérité, voilà ce qu’on se souhaite traditionnellement lors des effusions du Nouvel An. Et d’aucuns ajoutent : d’abord la santé, bien sûr ! Rien que du bon sens élémentaire, n’est-ce pas ? Une étude induit le doute.
Santé et prospérité, voilà ce qu’on se souhaite traditionnellement lors des effusions du Nouvel An. Et d’aucuns ajoutent : d’abord la santé, bien sûr ! Cette précision sous-entend clairement qu’on peut mener une vie passionnante tout en étant (presque) pauvre, alors que ce sera beaucoup plus difficile en étant milliardaire mais souffreteux. Rien que du bon sens élémentaire, n’est-ce pas ? Une étude tout récemment publiée en France est pourtant de nature à induire le doute. Elle indique en effet que l’espérance de vie est largement liée au niveau de revenus. Faudrait-il donc donner la priorité à la prospérité, la santé étant très opportunément entraînée dans son sillage ?
Chez les hommes, l’espérance de vie des riches est de 13 ans supérieure à celle des pauvres !
Réalisée par l’Insee, l’institut français de statistique, cette savante étude indique que l’espérance de vie à la naissance est, pour les femmes, de 8 ans plus élevée dans les 5 % de familles les plus aisées que dans les 5 % de familles les plus pauvres. Pour les hommes, l’écart frise même les 13 ans, soit 84,4 ans pour les uns et 71,7 ans à peine pour les autres ! Quelles sont les causes de ces différences dramatiques ? Les faibles revenus sont largement le triste lot des personnes moins qualifiées et celles-ci exercent des métiers plus dangereux et moins salubres. De plus, comme le révèlent diverses enquêtes, elles sont trop souvent obligées de renoncer à un suivi médical correct pour des raisons financières.
Deux éléments rassurent cependant quelque peu dans ce navrant tableau. D’abord, les personnes sans diplôme résorbent une bonne part de leur handicap de départ quand elles arrivent à des emplois correctement rémunérés. Moyennant, sans doute, des efforts très importants, qui sont donc fort heureusement récompensés. Ensuite, l’espérance de vie augmente très rapidement dès que le revenu familial progresse. Dans la petite classe moyenne, elle est déjà beaucoup plus éloignée de celle des classes défavorisées que de celle des classes très aisées. Autrement dit, pour vivre vieux, il n’est pas nécessaire d’être millionnaire, il suffit de ne pas être vraiment pauvre...
L’espérance de vie dans l’absolu est une chose, l’espérance de vie en bonne santé en est une autre. Elle est officiellement qualifiée d’espérance de vie sans incapacité (EVSI), ce qui signifie concrètement sans devoir limiter ses activités. Cette notion fait, depuis quelques années, l’objet d’études approfondies dans l’Union européenne. Et le tableau n’est pas vraiment rose, surtout pour les femmes. Alors que leur espérance de vie est de 5,4 ans supérieure à celle des hommes, l’écart se réduit à 0,7 an en EVSI (en Belgique, l’écart est même de 0,4 an en faveur des hommes). Globalement, l’EVSI ne représente que 80 % de l’espérance de vie totale pour les hommes et 76 % pour les femmes. Tout compte fait, on a bien raison de souhaiter d’abord une bonne santé !
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