Une nouvelle loi pour les troubles de voisinage
Intitulé « Les biens », le livre III du Code civil entrera en vigueur le 1er septembre. On y trouve une série de nouvelles règles concernant les troubles de voisinage.
Le chien des voisins d’Anna est souvent seul à la maison et manifeste son désarroi par d’incessants aboiements. Batteur amateur, le voisin de Bart s’exerce bruyamment à toute heure. Ces deux personnes ont un point commun: les nuisances qu’elles subissent sont excessives. En l’espèce, on parle de troubles anormaux de voisinage.
Ces troubles ou nuisances peuvent également être provoqués par le tas fumier que le voisin a déposé à la limite de votre parcelle ou par des arbres qui bloquent le soleil, quand bien même ils sont plantés à la distance légale.
La nouvelle loi
Si vous subissez actuellement des troubles de voisinage, vous n’êtes pas démuni. Vous pouvez entreprendre un certain nombre de démarches même si les règles actuelles manquent parfois de clarté. Elles sont le résultat d’une jurisprudence élaborée avec le temps. Mais les choses sont sur le point de changer puisque la réforme du droit des biens – une partie du Code Civil – entrera en vigueur le 1er septembre de cette année. Il contiendra des règles nettement plus explicites sur les droits des victimes de troubles de voisinage mais elles ne vaudront que pour les infractions commises à dater du 1er septembre.
Indépendamment de cette nouvelle loi qui vous permettra d’engager une procédure civile, vous disposez d’autres moyens d’action. En effet, les règlements communaux contiennent eux aussi des règles que vos voisins doivent respecter, comme l’interdiction de diffuser de la musique à un volume excessif.
Qu’est-ce qu’un trouble anormal de voisinage?
La nouvelle loi stipule que « les propriétaires voisins ont chacun le droit à l’usage et à la jouissance de leur bien immeuble. Dans l’exercice de ce droit, chacun d’eux respecte l’équilibre établi en ne causant pas à son voisin un trouble qui excède la mesure des inconvénients ordinaires du voisinage ».
Chacun doit pouvoir accepter les nuisances normales. La nouvelle loi prévoit un certain nombre de critères pour apprécier le caractère excessif du trouble. En cas de litige, il doit être tenu compte de toutes les circonstances, en particulier du moment, de la fréquence et de l’intensité du trouble ou de la destination publique du bien immeuble d’où le trouble provient.
Chacun doit pouvoir supporter les nuisances normales de ses voisins
Un trouble qui se reproduit fréquemment ou qui se produit la nuit sera plus rapidement considéré comme excessif qu’un trouble diurne ou très ponctuel. Il existe d’autres critères que ceux prévus par la loi. Par exemple, le fait que l’activité à l’origine de la nuisance existait déjà au moment où vous avez emménagé dans le quartier, etc.
En tout état de cause, la question de savoir si, dans un cas particulier, les troubles normaux de voisinage sont excessifs est une question de fait sur laquelle le juge a le dernier mot.
Que pouvez-vous faire vous-même?
Tentez d’abord de trouver une solution amiable avec votre voisin. Si cela ne fonctionne pas, envoyez-lui une lettre recommandée par laquelle vous lui demander de faire cesser la nuisance. Si cette démarche n’aboutit pas non plus, entamez une procédure devant le tribunal de justice de paix. Notez que votre voisin n’est pas tenu de se présenter devant le juge. Il se peut se faire représenter. Si la conciliation permet de trouver un accord, le juge de paix rédige un procès-verbal qui a valeur de jugement.
La procédure de conciliation pourrait évidemment ne pas aboutir, auquel cas vous avez la possibilité d’engager une procédure judiciaire devant la justice de paix, de préférence avec le concours d’un avocat. Si votre voisin à l’origine du trouble enfreint également un règlement communal (une radio beaucoup trop bruyante p.ex.), vous pouvez également déposer une plainte auprès de la police, plainte qui pourrait donner lieu à une amende.
La nouvelle loi stipule aussi très précisément les mesures que vous pouvez demander au tribunal (de justice de paix). Vous pourriez, par exemple, réclamer une compensation financière ou demander au juge d’ordonner à votre voisin de payer les travaux à effectuer à votre bien immobilier pour limiter les nuisances à un niveau normal. Vous pourriez aussi lui demander d’intimer à votre voisin de cesser les activités qui perturbent l’équilibre ou d’apporter des transformations à sa propriété afin de ramener la nuisance à un niveau normal. Il est évident qu’aucun nouveau déséquilibre ne pourra survenir par la suite. Vous êtes parfaitement habilité à demander plusieurs mesures et le juge peut décider d’un panachage.
Saisir la justice préventivement
La nouvelle loi introduit la possibilité de saisir préventivement la justice, sans avoir à attendre que se produise effectivement un trouble du voisinage. Ce n’est envisageable que si vous pouvez prouver que le bien immeuble de votre voisin fait courir « des risques graves et manifestes en matière de sécurité, de santé ou de pollution, rompant ainsi l’équilibre entre les deux propriétés ». On pense par exemple à un mur qui menace de s’effondrer et dont vous craignez que les débris ne causent des dommages à votre propriété.
Les arbres et les plantes à bonne distance
Jusqu’à présent, la règle voulait que les arbres à haute tige se trouvent à une distance minimum de 2 mètres de la haie ou du grillage du voisin, et les arbres à basse tige, arbustes et plantes à une distance minimum de 50 cm, à moins qu’un autre usage ne soit d’application à l’endroit où ils se trouvent. Mais comme la notion de haute et de basse tige est sujette à discussion, la nouvelle loi laisse tomber ce critère. A partir du 1/9, on ne prendra plus en compte que la hauteur réelle de l’arbre. Désormais, la distance par rapport à la limite de la parcelle devra être de 2 mètres minimum pour les arbres de 2 mètres de haut ou plus – hauteur mesurée à partir du milieu du pied de l’arbre. Les autres arbres, arbustes et haies devront se situer à 50 cm minimum de la limite avec le voisin.
Si un arbre de votre voisin est trop près de votre clôture, vous pouvez exiger qu’il le fasse abattre, sauf s’il s’agit d’un spécimen qui se trouve là depuis plus de 30 ans ou si le juge estime que ce serait excessif ou abusif. Il existe aussi une nouvelle législation concernant les branches ou les racines qui empiètent sur votre terrain. Si votre voisin ne réagit pas, alors que vous lui avez demandé de les éliminer, vous avez le droit de les (faire) retirer à ses frais.
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