Sur les pas de Casimir III de Pologne
Le roi Casimir III de Pologne a marqué le paysage architectural et culturel de son pays. La voïvodie de Lublin, à l’Est du pays, abrite encore des trésors architecturaux de cette époque. Découverte.
Prenez la route de Varsovie à Cracovie et faites une halte de 2 ou 3 jours dans la région de Lublin qui s’étire au bord de la Vistule, une région agricole fascinante dont l’histoire raconte les premiers balbutiements de l’Europe. Qui peut imaginer aujourd’hui qu’en 1569 fut signé en Pologne un pacte appelé « Union de Lublin » qui créa un « Royaume des Deux Nations » avec une Diète commune même si chaque partie conservait son armée, son trésor et ses lois et affichait les allures d’une fédération européenne avant la lettre.
La Pologne, la mémoire de l’Europe
C’est en effet entre les murs de l’église dominicaine de Lublin, fondée par Casimir le Grand, que fut prononcée sans aucun fait guerrier l’union indissoluble du royaume de Pologne et du grand-duché de Lituanie, les deux Etats catholiques d’Europe Centrale qui, à l’époque, recouvraient la Pologne actuelle, les Etats baltes, la Biélorussie et l’Ukraine. Ce siècle d’or ne résistera toutefois pas au fil des événements qui mèneront la Russie, la Prusse et l’Autriche à procéder au partage de la Pologne dès l’année 1772.
Il faut aujourd’hui pénétrer dans le château de Lublin pour y découvrir au sein du Musée de la Province de grands tableaux dont l’un d’eux raconte l’Union de Lublin. La chapelle gothique du château a été préservée. Recouverte de fresques russo-byzantines très colorées, elle raconte une rencontre exceptionnelle entre deux cultures, celle de l’Est et de l’Ouest, témoignage de la belle harmonie entre les cultures chrétiennes qui se côtoyaient au XVe siècle.
Kasimierz Dolny, le Pont-Aven polonais
Ce gros village assoupi dans un méandre de la Vistule entre deux collines dominées l’une par la silhouette du couvent des Franciscains et l’autre par les ruines imposantes d’un château médiéval porte le nom de son fondateur, le roi Casimir le Grand. Il y a établi un port de commerce important au bord du fleuve, principal axe commercial de l’époque entre le Nord et le Sud du pays. La petite ville prospère rapidement et les façades des maisons à arcades qui bordent le Rynek s’ornent de stucages et de mascarons en pierre pour souligner la richesse des commerçants.
Les invasions suédoises de 1655 puis les épidémies de choléra et de peste figent cet élan jusqu’à ce que la petite bourgade soit redécouverte par des peintres séduits par son ambiance bucolique, entre autres par un élève de Gauguin, Wladyslaw Slewinski qui, de retour de Pont-Aven, rassembla ici de nombreux artistes. Une émulation créatrice qui s’éteignit malheureusement avec les persécutions contre les Juifs, nombreux dans le village.
Un réseau de chemins sillonne les environs immédiats, que ce soit vers les berges de la Vistule ou alors vers le mont des Trois Croix qui rendent hommage à la population décimée par la peste en 1708. La vue y est impressionnante sur la petite ville allongée au bord de la Vistule mais elle l’est encore davantage depuis le haut de la Tour de Guet du château médiéval qui servait jadis de phare pour la navigation.
Lublin, la Jérusalem de Pologne
Lublin, la petite capitale régionale est aussi une ville universitaire, ce qui lui garantit une ambiance animée dans la vieille ville piétonnière, lieu de rendez-vous des étudiants aux heures douces des soirées d’été. Une rue dallée relie deux anciennes portes médiévales et traverse le Rynek, une place où des façades déjà restaurées avec de belles fresques murales, des fenêtres ouvragées ou des médaillons voisinent d’autres encore dégradées affichant de vieilles photos de familles juives disparues durant l’occupation nazie, ce qui accentue d’autant la mélancolie des lieux.
Au-delà de la porte Grodzka qui mène au château s’ouvre également l’ancien quartier juif. La communauté juive a toujours été importante en Pologne, jouissant de privilèges et d’une autonomie accordée par les différents rois. Casimir le Grand leur attribua des terres faiblement peuplées dans les provinces orientales et leur assura la sécurité des personnes et des biens ainsi que la liberté religieuse. Sous son impulsion, un esprit d’ouverture va souffler sur Lublin où Juifs et Polonais vivaient en parfaite harmonie. Aux côtés de l’église dominicaine et de la cathédrale dont la richesse des décorations témoigne de l’opulence de l’évêché, de nombreuses synagogues se sont créées. Au XVIe siècle, Lublin devint même un important foyer d’études bibliques et talmudiques en Europe. A la veille de la Deuxième Guerre mondiale, Lublin recensait quelque 40.000 Juifs soit un tiers de la population locale.
Des châteaux princiers
Le siècle d’or de la Pologne a vu s’ériger de nombreux châteaux dont la plupart sont en ruines mais leurs silhouettes tronquées dressées vers le ciel semblent encore monter la garde. Le château de Janowiec, sur l’autre rive de la Vistule, en face de Kazimierz Dolny, était certainement un des plus fastueux du pays avec une centaine de pièces semble-t-il. Les invasions suédoises ont laissé un champ de ruines romantiques à souhait quand on se prend à contempler le paysage depuis une fenêtre ouverte à tous les vents qui offre une vue imprenable sur le fleuve et le village en contrebas.
Le palais baroque de Kozlowka au nord de Lublin séduira les amoureux du genre avec sa collection de stucs et de dorures. Il appartenait à la famille Zamoyski dont les derniers descendants vivent aujourd’hui au Canada et aux Etats-Unis même si un pavillon leur est exclusivement réservé quand ils reviennent en Pologne. Très bien conservé, il expose au coeur d’un mobilier luxueux de nombreux portraits de famille ainsi que qu’une belle bibliothèque de 7.300 volumes!
Un parc paysager à la française prolonge le château sur ses façades Ouest et Est tandis que des pavillons ferment les autres côtés. L’un d’eux rassemble une collection de peintures et de sculptures du « réalisme socialiste » avec des représentations des grandes figures du mouvement et des scènes de la vie quotidienne à l’ère communiste, un contraste étonnant à côté de la fastueuse résidence de l’aristocratie polonaise
Pratique
Infos: www.lubelskietravel.pl ou www.pologne.travel
Se loger: A Lublin, l’hôtel Wieniawski est à moins de 10 min. à pied du vieux centre www.hotelwieniawski.pl.
Se restaurer: à Lublin, le restaurant juif Mandragora est installé dans une maison dont les salles racontent l’atmosphère familiale du Lublin de jadis www.mandragora.lunlin.pl.
A Kazimierz Dolny, le restaurant Kuchnia i Wino permet de découvrir une cuisine polonaise plus raffinée www.restauracjakuchniaiwino.pl
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