La fatigue surrénale existe-t-elle ?
Vous êtes fatigué, déprimé, sans énergie ? Une recherche internet pourrait vous amener à conclure que vous souffrez de » fatigue surrénale « , soit un mauvais fonctionnement des glandes surrénales induit par l’excès de stress....
Votre sommeil n’est pas réparateur, vous avez des maux de tête, une mauvaise mine et le moral à zéro ? Cette mauvaise passe peut être liée à des causes très différentes, qu’il s’agisse d’une maladie (dépression, infection, maladie auto-immune, problème de thyroïde...) mais aussi tout simplement à l’accumulation de problèmes professionnels ou personnels. Pourtant, dans un monde où nous aimons avoir une explication à tout, il n’est pas rare aujourd’hui d’entendre parler de fatigue surrénale, une maladie qui serait provoquée par le stress de nos vies modernes : celui-ci épuiserait nos glandes surrénales, qui ne parviendraient plus à secréter le cortisol. Le cortisol joue un rôle majeur dans le métabolisme des glucides et des lipides et possède des propriétés anti-inflammatoires. Il est souvent appelé » hormone du stress » car c’est lui qui nous permet de réagir en cas de danger en mobilisant notre énergie.
LES GLANDES SURRÉNALES
Les glandes surrénales sont situées sur chaque rein, qu’elles surmontent à la manière d’un petit chapeau. Elles sont constituées à la périphérie d’une partie jaunâtre appelée la corticosurrénale, et à l’intérieur d’une zone rougeâtre, la médullosurrénale. La médullosurrénale sécrète l’adrénaline et la noradrénaline qui accélèrent les battements cardiaques et augmentent la pression artérielle. La corticosurrénale sécrète, elle, un groupe d’hormones appelé corticostéroïdes.
Parmi elles, le cortisol, la testostérone mais aussi l’aldosterone qui agit sur le rein en réabsorbant le sodium et en éliminant le potassium. Le fonctionnement des surrénales est dicté par le cerveau et plus particulièrement par l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA), aussi appelé axe corticotrope. » Cet axe fonctionne en parfait équilibre, même en cas de stress répétés. Les valeurs de cortisol seront alors élevées mais l’axe fonctionnera normalement « , explique le Pr Vincent Geenen, endocrinologue. En cas de grave dépression, on constate au contraire que l’axe est moins réactif, mais ce sont alors toutes les valeurs qui sont en baisse et pas seulement le cortisol.
GARE AUX DIAGNOSTICS DOUTEUX
Pour le Pr Vincent Geenen, le concept de fatigue surrénalienne ne sert en réalité qu’à justifier les traitements douteux administrés par des médecins autoproclamés » hormonologues « , un titre non protégé que chacun peut apposer sur sa plaque. » Ces médecins se basent soit sur un prélèvement sanguin soit sur un dosage de cortisol dans la salive pour décréter que la valeur de cortisol est basse et donc que la personne est en fatigue surrénalienne. Cela débouche sur des prescriptions complètement inutiles d’hydrocortisone, l’équivalent pharmacologique du cortisol. » Prescrire du cortisol à des personnes souffrant d’un excès de stress paraît au spécialiste d’autant plus injustifié que le stress a précisément tendance à augmenter le taux de cortisol...
Pour évaluer de manière fiable la fonction surrénalienne, il n’existe en réalité qu’un test : la récolte des urines de 24 heures et son analyse par un endocrinologue. En effet, l’axe corticotrope fonctionne de manière circadienne, c’est-à-dire que son activité maximale a lieu vers 5 ou 6 heures du matin et va plutôt ralentir au cours de la journée. » Seul le lien entre le taux d’aldosterone et le taux de cortisol permettra d’orienter le diagnostic vers une insuffisance surrénalienne ou un syndrome d’hypersecrétion surrénalienne « , précise le spécialiste.
LA MALADIE D’ADDISON
Si le stress n’est pas à l’origine du dysfonctionnement des glandes surrénales, celles-ci peuvent par contre être le siège de différentes maladies. En cas de fatigue chronique et inexpliquée, il ne faut donc pas hésiter à réaliser un bilan endocrinologique. La maladie d’Addison, par exemple, se caractérise par l’arrêt ou la diminution de sécrétion des hormones produites par les glandes surrénales, en particulier le cortisol. Ses symptômes ? Une fatigue certes mais aussi une pigmentation de la peau, en particulier au niveau des cicatrices et des plis, un manque d’appétit et une diminution de la tension artérielle.
» Avant, la cause la plus fréquente de la maladie d’Addison était la tuberculose : aujourd’hui, il s’agit le plus souvent d’une maladie auto-immune, dans laquelle l’organisme monte une réponse immunitaire contre les surrénales. « . Cette maladie sera prise en charge par des hormones de substitution.
Le syndrome de fatigue chronique
La fatigue peut être interprétée comme un signal d’alerte de l’organisme : vous avez dépassé vos limites et il faut vous reposer ! Mais lorsqu’elle s’installe de manière chronique sur plusieurs mois, qu’elle n’est pas soulagée par le sommeil et qu’elle n’est liée ni à une maladie grave ni à une dépression, il peut s’agir d’un syndrome de fatigue chronique (SFC), aussi parfois appelé » encéphalomyélite myalgique » ou » maladie des yuppies » (car il atteint le plus souvent les travailleurs entre 20 et 40 ans). Reconnu par les scientifiques depuis les années 90, le SFC est une maladie relativement rare (1 personne sur 200 dans les pays industrialisés) et reste en partie inexpliqué. Une des hypothèses les plus souvent avancées est celle d’une origine infectieuse, mais des facteurs psychiques et psychosociaux pourraient également être en jeu.
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