La ménopause... à durée indéterminée ?
« C’est la ménopause : ça va passer ! » Contrairement à certaines idées reçues, la ménopause n’est pas l’affaire de quelques mois : c’est une nouvelle étape de la vie... à durée indéterminée.
Selon une enquête récente réalisée par la Société belge de la ménopause (BMS), 4 femmes belges sur 5 souffrent de symptômes, psychiques et physiques, liés à la ménopause. 41% d’entre elles font part d’un impact négatif de celle-ci sur leurs capacités physiques et 38% sur leur apparence. Grande fatigue, douleurs musculaires et/ou articulaires, irritabilité, bouffées de chaleur, sueurs nocturnes ou insomnies : les symptômes sont divers et parfois invalidants. Et toutes les femmes ne sont pas égales ! Alors que certaines n’auront jamais aucun symptôme, d’autres les cumuleront... jusqu’à la fin de leur vie. Les facteurs qui expliquent cette variabilité sont encore mal connus, même si on sait que le surpoids, le tabagisme ou l’excès d’alcool peuvent aggraver ces manifestations indésirables. Néanmoins, la majorité des femmes symptomatiques ne présentent aucun de ces facteurs de risque !
Sept ans de bouffées de chaleur
Selon cette même étude, 61% des femmes pensent que la ménopause est une « période éphémère » de leur vie. 44% d’entre elles estiment ainsi que la ménopause ne dure qu’entre trois et cinq ans tandis que 17% imaginent qu’elle correspond a un laps de temps de seulement un ou deux ans... Or, il n’en est rien. La ménopause – qui correspond à l’arrêt du fonctionnement des ovaires – est un processus irréversible et non une période transitoire. À l’heure où l’espérance de vie des femmes en Belgique est de 83 ans, la ménopause représente en réalité un tiers de leur vie ! « Les symptômes comme les bouffées de chaleur, les troubles de l’humeur et les sudations nocturnes sont surtout présents au début de la ménopause et ont tendance à diminuer avec le temps « , rassure cependant le Dr Serge Rozenberg, gynécologue au CHU Saint-Pierre et membre de la BMS.
À quel âge ?
L’âge médian de la ménopause est de 51 ans. Mais l’arrêt définitif des règles est souvent précédé d’une période de péri-ménopause (entre 18 et 36 mois) pendant laquelle les cycles deviennent irréguliers. Des symptômes comme les bouffées de chaleur sont souvent déjà présents pendant cette période.
Néanmoins, comme l’a montré une récente étude américaine publiée en 2015 dans la revue Jama internal medicine, ces symptômes s’échelonnent en réalité sur une période bien plus longue que ce qu’on pensait par le passé. À partir de l’analyse de 3.300 dossiers de femmes ménopausées, elle prouve que la durée moyenne des bouffées de chaleur aurait été sous-évaluée d’au moins cinq ans ! Parmi les femmes concernées régulièrement (au moins six jours sur deux semaines), la durée moyenne d’expression des symptômes serait ainsi de 7,4 ans et de 4,5 ans après les dernières règles. Les femmes noires souffriraient plus longtemps de ces bouffées de chaleur (dix ans en moyenne) tandis que les Asiatiques seraient au contraire les plus épargnées (cinq ans en moyenne). Par ailleurs, l’étude suggère que plus les femmes connaissent des bouffées de chaleur tôt avant l’arrêt de leurs règles, plus elles risquent de subir ces désagréments sur une longue période : 11,8 ans en moyenne contre 3,4 ans pour celles qui connaissent les premiers symptômes après leur entrée en ménopause.
Peu de femmes traitées
Or, il se pourrait que la méconnaissance des femmes quant à la réalité de la ménopause ait des répercussions directes sur la manière dont elles prennent aujourd’hui en charge leurs symptômes. Toujours selon la Société belge de la ménopause, 82% des femmes savent en effet qu’il existe des traitements susceptibles d’alléger leurs symptômes mais moins d’une sur deux (46 %) cherche effectivement de l’aide auprès de son médecin après avoir constaté une aménorrhée prolongée (disparition des menstruations durant une période supérieure à trois mois). Une attitude qui pourrait être liée à la méfiance que suscite encore l’hormonothérapie substitutive : en Belgique, seules 10 à 15 % des femmes ménopausées prennent aujourd’hui un THS (traitement hormonal substitutif). Parce qu’ils peuvent entraîner une augmentation légère du risque de cancer du sein et des maladies cardiovasculaires, ces traitements doivent en effet être prescrits avec vigilance et au cas par cas. Mais selon le Dr Herman Depypere, Vice-Président de la Société belge de la ménopause, ils pourraient représenter une solution pour un très grand nombre de femmes. « L’hormonothérapie substitutive constitue non seulement une marche à suivre potentielle durant la ménopause, mais s’avère aussi être le traitement le plus efficace contre les bouffées de chaleur, explique-t-il. En outre, cela aide à prévenir la perte osseuse ainsi que les fractures de la colonne vertébrale et/ou de la hanche liées à ce changement inévitable. On sait aujourd’hui que les risques associés aux THS sont minimaux dans la tranche d’âge qui nous intéresse, c’est-à-dire entre 50 à 60 ans. Pour les femmes qui sont symptomatiques, les bénéfices sont en général bien supérieurs aux risques », explique de son côté le Dr Rozenberg
Aujourd’hui, il est habituellement recommandé de ne pas poursuivre ces traitements plus de quelques années. Mais comme on le voit, cette durée théorique ne correspond pas à la durée réelle des symptômes... Alors, peut-on continuer de prendre un THS à 60 ou 70 ans ? « Le risque de faire un accident cardiovasculaire augmente automatiquement avec l’âge : on a donc tendance à se montrer prudent. Néanmoins, chez une femme de 70 ans qui est en pleine forme, qui fait de l’exercice physique, qui n’a pas d’excès pondéral, pas d’alcoo lisme, pas de tabagisme, pas de cholestérol, une hypertension absente ou contrôlée, rien ne s’oppose à un traitement « , commente le Dr Rozenberg.
Croire que la ménopause n’est l’affaire que de quelques mois ou années, c’est aussi méconnaître les effets durables de certaines évolutions, notamment en termes de sexualité. Selon la BMS, 30% des femmes ménopausées rapportent une baisse de libido, alors que 1 femme sur 4 souligne l’apparition de sécheresse vaginale. De manière générale, 1 femme sur 3 rapporte un impact négatif sur cet aspect de sa vie.
Une sexualité préservée
« Au-delà des symptômes généraux, la ménopause a aussi un impact sur la sphère uro-gé-nitale, avec un risque d’atrophie vaginale lié à la carence en oestrogènes, explique le Dr Rozenberg. Cette atrophie entraîne une sécheresse vaginale, des infections à répétition, une incontinence d’urgence mais aussi des douleurs lors des rapports. Ces douleurs créent à terme une appréhension chronique, cause de vaginisme. » Certaines femmes en viennent alors à renoncer à leur sexualité, faute d’une prise en charge suffisamment précoce de ces problèmes. « Certes, certaines ne souffrent pas de cette évolution. Mais chez la plupart des femmes, cela entraîne une souffrance, avec parfois d’importantes répercussions sur la qualité de vie et sur le couple, a fortiori quand le partenaire rencontre lui aussi des troubles sexuels liés à l’âge. « Or, outre les THS par voie orale, il existe des traitements oestrogéniques admi nistrés par voie vaginale qui permettent de lutter spécifiquement contre ces désagréments. « Dans tous les cas, le message est de dire aux femmes que si elles ont des symptômes, il y a des solutions », martèle le Dr Rozenberg.
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