Mauvaise vue mais toujours au travail ! C’est ainsi qu’Evy et Cécile ont surmonté les obstacles
Du simple fait de postuler pour un emploi à la difficulté des déplacements domicile-travail... Pour ceux qui ont une déficience visuelle grave, le travail n’est pas si évident. « Les plus gros obstacles semblent encore être les préjugés et les idées reçues sur ce handicap« , déclare Bart Verdickt, coach de l’emploi à la Ligue Braille.
Le nombre de personnes malvoyantes qui travaillent dans notre pays est encore faible. « Cependant, beaucoup d’entre elles possèdent les compétences et les diplômes nécessaires mais, pour diverses raisons, ne trouvent pas leur place sur le marché du travail », constate Bart Verdickt. Afin d’identifier les possibles obstacles, la Ligue Braille a mené une vaste enquête auprès de plus de 500 personnes ayant une déficience visuelle.
La mobilité s’est avérée être l’un des problèmes les plus fréquemment signalés (43 %). Ce sont surtout les lieux de travail qui nécessitent une voiture qui rendent les choses difficiles. Cependant, d’autres problèmes moins évidents gênent également les malvoyants. Tels que le manque de compétences (ex : postuler à un emploi), le manque de reconnaissance de leur handicap, la peur de la part des employeurs, un lieu de travail inapproprié et la crainte des malvoyants d’être considérés comme pas suffisamment flexibles et rentables. Leur handicap limite aussi quelque peu leur choix. Mais la satisfaction de ceux qui ont trouvé un travail adapté est très élevée. Plus de 80 % disent qu’ils se sentent bien dans leur travail.
Coaching sur mesure
L’aide à la recherche d’emploi, mais aussi à l’adaptation du travail lorsqu’une personne devient soudainement malvoyante à cause d’un trouble ou d’un traumatisme, s’avèrent être nécessaires. Plus d’un tiers des malvoyants demandent ce soutien et environ 40% l’obtiennent. Bart Verdickt, coach de l’emploi: « Nous travaillons un peu différemment des conseillers en emploi réguliers tels que le Forem. Nous établissons au préalable un bilan personnel et examinons quelles compétences doivent encore être renforcées. Par exemple, nous apprenons à travailler avec des programmes informatiques spéciaux afin d’être en mesure de postuler sans difficulté et de s’en sortir sur le lieu de travail. Il peut s’agir d’ajustements tels que le contraste, l’agrandissement, l’affichage braille, etc.
Nous aidons également l’employeur à adapter le lieu de travail. Cela va de l’assistance en matière de demandes administratives de primes et d’outils, à l’aménagement du bureau pour disposer d’un éclairage adapté, ainsi qu’à l’information et la sensibilisation des collègues. Ce dernier point est extrêmement important pour éviter les malentendus et créer un lieu de travail agréable. »
Malvoyant et professeur d’informatique
Cécile Vanhole (48 ans) souffre de rétinite pigmentaire, une maladie qui fait perdre progressivement la vue. « Au début, je ne souffrais que de cécité nocturne, ce qui ne me dérangeait pas du tout dans mon travail chez le concessionnaire automobile D’Ieteren. J’ai été promue, mais à mesure que ma maladie s’aggravait, j’ai dû me forcer de plus en plus à travailler à l’écran. En fin de compte, ces efforts persistants ont conduit à une détérioration de ma vision dans un court laps de temps. Peu de temps après, on m’a dit que je devais rendre ma voiture de fonction, car je n’étais plus capable de conduire. Je me suis alors rendu compte que je devais chercher un autre poste dans l’entreprise. Heureusement, je pouvais compter sur l’appui de mon employeur et de mes collègues.
Aujourd’hui, je suis assistante et formatrice et j’ai un lieu de travail entièrement adapté, avec une téléloupe pour lire des documents, un clavier spécial et un programme informatique qui s’utilise vocalement. Cela signifie que je suis parfaitement équipée pour former moi-même mon équipe. Dès le début, j’ai été très ouverte au sujet de mon handicap. Cela aide énormément. Au sein de l’entreprise, ils ont également montré à tous les collègues un film de sensibilisation sur ce qu’est ma maladie, et plusieurs d’entre eux ont même essayé des lunettes spéciales leur permettant de voir ce que c’est que d’être à ma place. Depuis, personne n’a plus jamais oublié de fermer les portes des placards ou de ranger sa chaise sous la table ! «
Accepter la restriction
Evy Cnockaert (50 ans), qui travaille comme adjointe administrative au SPF Mobilité, a également constaté à quel point sa maladie oculaire avait modifié sa manière de travailler. « J’ai toujours eu de mauvais yeux, mais jusqu’à il y a peu, les inconvénients étaient limités. J’ai fais plusieurs examens et j’ai pu améliorer ma vision jusqu’à ce qu’on me découvre de graves problèmes oculaires. J’ai suis alors passée plusieurs fois sur le billard. La cataracte et le glaucome ont tellement détérioré ma vision que j’ai dû limiter mes ambitions et revoir mes plans de carrière. Pendant longtemps, j’ai eu beaucoup de mal à accepter mon handicap, mais avec le soutien moral et pratique de la Ligue Braille, j’ai pu m’adapter. Je travaille désormais en quatre cinquième, dans un environnement de travail adapté.
Mes collègues connaissent mon histoire et m’aident si besoin. Quand je cherche un collègue, je l’appelle à voix haute pour qu’il puisse me répondre, alors qu’avant, je devais traverser tout le bureau. De temps à autre, il est aussi très gratifiant de faire de l’humour sur son handicap. Maintenant que j’ai accepté mon handicap, je me sens soulagée. Cela m’a également donné l’occasion de développer d’autres aspects de moi-même. Je me suis découvert un côté artistique et je viens de publier mon premier livre. »
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