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Refaire du sport après un pépin cardiaque

Julie Luong

Faire du sport quand on a des problèmes cardiaques, ça peut faire peur. Pourtant, à long terme, l’exercice physique diminue drastiquement le risque cardiovasculaire. Un constat d’autant plus vrai après un premier incident...

Aujourd’hui, le lien entre sport et maladies cardiovasculairesest clairement démontré. La vaste étude Interheart menée sur les cinq continents a prouvé que la pratique régulière d’une activité physique d’intensité légère à modérée améliorait le profil de risque cardiovasculaire. À l’instar de la consommation très modérée d’alcool (en particulier de vin rouge) et d’un régime riche en fruits et légumes, l’activité physique protège le système cardiovasculaire. « L’activité physique améliore divers processus physiologiques et biochimiques », précise le Dr Étienne Hoffer, chef de service en cardiologie au CHR Citadelle de Liège. En outre, l’activité sportive régulière améliore les paramètres de coagulation et l’activité du système nerveux autonome, ce qui explique que la fréquence cardiaque de repos de quelqu’un qui pratique du sport est généralement moindre que celle d’une personne sédentaire. « Or on sait que ce simple paramètre physique présente une bonne valeur prédictive en termes de survie – et en particulier de non-survenue d’un événement cardiovasculaire – à dix et vingt ans « , rappelle le Dr Hoffer. Mais paradoxalement, au moment même de l’activité physique, le risque de survenue d’un événement cardiaque est augmenté ! « On considère qu’il se produit en moyenne un événement cardiovasculaire majeur pouvant aller jusqu’au décès par 50.000 heures de pratique sportive. À l’échelle de la Belgique, ceci explique la survenue de quelques événements annuels souvent largement médiatisés car touchant des individus jeunes a priori en bonne santé », analyse le spécialiste.

(Re)commencer le sport

Avant de commencer ou de recommencer une activité sportive, il est donc recommandé de faire le point avec son généraliste, voire avec un spécialiste de la médecine cardiaque et sportive.  » Il est important de préciser le cadre dans lequel la personne souhaite pratiquer son activité : s’agit-il d’une activité récréative ou d’une activité intensive pratiquée dans un esprit de compétition? » S’imposer un entraînement de fond est un critère essentiel « Débouler sur un terrain de tennis alors qu’on ne fait aucune activité de fond et qu’on s’est à peine échauffé est une très mauvaise idée », met en garde le Dr Hoffer. Une consultation médicale permet également de faire un check-up, éventuellement complété par un électrocardiogramme de repos. « On a montré que cet examen permettait de dépister bon nombre d’anomalies cardiaques qui peuvent accroître le risque lors de la pratique sportive. « 

L’activité physique améliore divers processus physiologiques et biologiques

Chez le sujet de moins de 35 ans, la plupart des accidents cardiovasculaires sont en effet liés à des anomalies cardiaques présentes à la naissance mais méconnues : anomalies rythmiques, valvulopathies, anomalies d’implantation des artères coronaires, etc. Chez les personnes de plus de 35 ans, les accidents cardiaques sont bien davantage liés à une mauvaise santé des artères, liée au surpoids, au tabagisme, à hypertension, à l’excès de cholestérol mais aussi à des facteurs héréditaires. « Ceci dit, on observe aujourd’hui des problèmes coronariens chez des patients de plus en plus jeunes, avec des infarctus myocardiques dès l’âge de 30 ans.Un phénomène lié aux évolutions du mode de vie, et notamment à l’obésité », explique le Dr Hoffer.

Sport et angine de poitrine

Les personnes qui souffrent d’angine de poitrine (douleur thoracique à l’effort) doivent, elles, bénéficier d’un programme sportif personnalisé car on sait que l’angine de poitrine est la première étape de la maladie coronaire. L’utilisation d’un cardiofréquencemètre permet de sécuriser l’activité : au-delà d’une certaine fréquence déterminée avec le médecin, le patient sait qu’il doit lever le pied. Les sports de très haute intensité comme le squash ou la boxe sont fortement déconseillés : on leur préférera les sports d’endurance à intensité faible ou modérée (marche, vélo, natation...). Surtout, il faut écouter son corps : pas question de faire du sport lorsqu’on ne se sent pas dans son assiette ! Partir faire son footing ou jouer un match quand on est malade, qu’on a mal dormi ou qu’on a trop bu la veille est une très mauvaise idée – maladie coronaire ou non. « À la moindre sensation d’inconfort, il convient de stopper l’activité sportive. L’angine de poitrine silencieuse se manifeste souvent par un malaise lors des dix premières minutes d’activité, après quoi le corps met en place des mécanismes de défense qui lui permettent de faire face à l’effort. Néanmoins, le risque demeure bel et bien présent. Il faut toujours cesser l’activité et en parler à son médecin quand on ressent un essoufflement ou un malaise inhabituel », rappelle le Dr Hoffer.

Un examen médical pour tous les sportifs ?

Un footballeur qui s’écroule sur le terrain, un tennisman qui tombe raide mort... Ces événements tragiques font régulièrement la une des médias. Comment les éviter ? « Certains pays ont une approche basée sur le dépistage de masse. Les Italiens ont notamment démontré qu’il était possible de réduire de façon très significative le taux de mortalité lié à la pratique de sport. Là-bas, toute personne qui demande une licence ou qui s’inscrit à une compétition doit obtenir ce certificat de non contre-indication à la pratique sportive« , précise le Dr Hoffer. En Belgique, seules quelques Fédérations sportives exigent ce certificat. Les sports les plus en vogue comme le tennis et le football n’ont en revanche aucune politique de prévention. « En ce moment, une réflexion est en cours pour rendre obligatoire le certificat de non contre-indication à la pratique sportive. Toute la question étant de savoir à partir de quel âge et à quelle fréquence on l’applique », ajoute le Dr Hoffer. Pour l’heure, l’initiative revient aux sportifs et aux entraîneurs de réaliser une exploration complète dans une clinique du sport.

La revalidation

L’exercice physique est d’autant plus important chez les personnes qui ont eu un accident cardiaque, quels que soient leur âge et leurs habitudes sportives.  » Chez quelqu’un qui a des atteintes coronaires, la pratique sportive améliore la perfusion du muscle cardiaque et, in fine, le pronostic coronarien. Quand vous avez fait un infarctus et que vous êtes inclus dans un programme de revalidation cardiaque, le bénéfice en termes de diminution de mortalité et de survenue d’un nouvel événement se situe autour de 30 % ! Mais bien sûr, on ne parle plus ici de sport de compétition mais d’exercices encadrés « , analyse le Dr Hoffer. L’exercice physique fait en effet partie de la réadaptation cardiaque qui a lieu dans les 6 mois suivant un infarctus du myocarde. Pratiquée dans des centres de revalidation agréés par l’Inami, la revalidation donne droit à un remboursement partiel sur 45 séances.

Après cette période, la poursuite d’une activité physique est vivement conseillée : elle peut se faire au sein des  » Coronary clubs « , où l’exercice physique est stimulé de manière ludique sans esprit de compétition. Les séances y sont supervisées par des moniteurs spécialisés et sous la surveillance médicale d’un cardiologue ou d’un médecin (voir la liste sur https://liguecardioliga.be/club-cardio/). Aujourd’hui, certains clubs de fitness proposent également une section spécialement dédiée aux personnes présentant des problèmes cardiaques. D’autres, enfin, préfèrent reprendre une activité seules, sur base d’un programme pensé avec leur médecin. Peu importe la formule : le tout est de trouver une activité ludique et stimulante. Le meilleur moyen de s’y tenir !

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