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S’attaquer aux acouphènes par la stimulation cérébrale

Bonne nouvelle pour les personnes souffrant d’acouphènes. Selon une récente étude internationale, l’utilisation d’un appareil ciblant les régions cérébrales affectées pourrait atténuer l’effet de ces « bruits fantômes ».

« Ce n’est pas un remède miracle, mais c’est un outil très intéressant qui vient compléter les traitements existants contre les acouphènes », explique le Dr Michael Boedts, spécialiste ORL, qui a collaboré à l’étude publiée dans Nature Communications.

Environ 30% des Belges sont confrontés à une forme d’acouphène, c’est-à-dire que leur cerveau produit un son qui n’existe pas vraiment. Le nombre de personnes souffrant d’acouphènes est en augmentation depuis des années. Ce bourdonnement incessant affecte toutes les tranches d’âge, mais l’intensité des symptômes varie d’une personne à l’autre. Parfois, les bourdonnements ou sifflements sont temporaires et disparaissent spontanément. D’autres personnes ne sont que peu gênées par le son, mais pour un tiers des patients, cela devient vraiment une nuisance permanente, souvent accompagnée d’anxiété, de stress et de troubles du sommeil.

Augmentation de la vigilance

« Plusieurs facteurs peuvent jouer un rôle dans l’apparition des acouphènes, tels que des lésions auditives dues à l’exposition au bruit, des anomalies anatomiques, des maladies chroniques, une sensibilité au stress... Mais c’est souvent aussi le symptôme d’un organisme en surcharge. Comme les gens sont dans un état de vigilance accrue pendant de longues périodes, le cerveau s’adapte à ce nouvel état de stress par le biais du mécanisme de plasticité cérébrale. Lorsqu’un élément déclencheur supplémentaire, tel qu’une infection virale, un choc émotionnel ou l’exposition à un bruit fort, se produit et déclenche des acouphènes, cela peut suffire à maintenir en permanence le cerveau dans cet état de vigilance accrue. C’est ce qui fait que les acouphènes s’installent durablement dans le cerveau », explique le Dr Boedts (AZ Maria-Middelares et la Clinique de l’Écoute).

Stimulation bimodale

Depuis plusieurs années, les scientifiques s’efforcent de trouver des solutions à ce phénomène. Les traitements actuels, tels que la thérapie cognitivo-comportementale, l’ostéopathie ou la prise en charge de la perte auditive, permettent souvent de rendre les acouphènes moins gênants et donc plus supportables, bien qu’ils ne disparaissent pas complètement. Grâce à un dispositif médical (Lenire) qui envoie des stimuli sonores et électriques vers certaines régions du cerveau, les chercheurs ont désormais franchi une étape supplémentaire.

« Cette stimulation cérébrale dite bimodale a été testée sur 112 personnes souffrant d’acouphènes, qui ne présentaient pas de lésions auditives et qui n’étaient ni anxieuses ni stressées. Pendant six semaines, ces personnes ont utilisé l’appareil deux fois par jour, lequel administre des sons et des stimuli électriques via la langue et les oreilles pour stimuler les régions cérébrales affectées. En apaisant la zone du cerveau responsable des acouphènes, la plasticité cérébrale est réactivée, permettant une évolution progressive vers un état « sain », avec une réduction des acouphènes. En somme, cette méthode permet de recalibrer ces zones du cerveau. »

« Les résultats ont été tout à fait remarquables. Chez deux sujets sur trois, on a constaté une amélioration significative des acouphènes. Une étude précédente avait déjà montré que ces résultats persistaient même après un an. »

Combinaison avec un traitement existant

Le Dr Boedts considère que cette approche est avant tout complémentaire des traitements existants. « Nous avons depuis établi un protocole dans lequel nous nous attaquons d’abord aux acouphènes par le biais de thérapies traditionnelles. En traitant la tension musculaire et l’anxiété, de nombreux problèmes sont déjà résolus. Si les acouphènes restent trop importants par la suite, nous disposons désormais d’un outil supplémentaire. La stimulation bimodale fonctionne mieux lorsque les personnes sont d’abord calmées et qu’elles s’adonnent ensuite à la stimulation cérébrale pendant 6 semaines ». L’appareil, qui coûte environ 3000 euros, a déjà reçu le feu vert aux États-Unis, et une clinique d’audiologie en Belgique le propose déjà.

À terme, le Dr Boedts s’attend à ce que le traitement évolue de la stimulation bimodale – via des sons et des stimuli électriques – à la stimulation multimodale, dans laquelle les zones du cerveau sont influencées par différents types de stimuli, et peut-être pas seulement pour les acouphènes, mais aussi pour d’autres problèmes.

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