La maltraitance des personnes âgées, un phénomène trop peu étudié
La maltraitance des personnes âgées concernerait une personne sur six de 60 ans ou plus dans le monde. Mais seul un cas sur 24 serait signalé, la « pointe de l’iceberg », selon l’OMS. Le Centre fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE) s’est penché sur le problème pour tenter d’y voir plus clair et d’améliorer la détection et la prise en charge des personnes concernées, sachant qu’aucune statistique n’est disponible en Belgique sur le sujet.
La maltraitance peut prendre la forme de négligences ou de violences physiques, psychologiques, sexuelles, financières ou civiques (placement forcé, privation de liberté, ouverture du courrier...) et se produire dans différents contextes (sphère familiale, maison de repos, soins à domicile...). « Mais les victimes de maltraitance sont souvent réticentes à dénoncer leur situation par honte, crainte de trahir une relation de confiance, crainte de représailles ou méconnaissance des possibilités d’accompagnement qui existent », relève le KCE.
La situation est d’autant plus complexe qu’elle nécessite l’intervention de différents secteurs (les services de santé, l’aide sociale, la police et la justice) lesquels ont parfois du mal à communiquer entre eux.
Pour lutter contre la sous-détection de la maltraitance des personnes âgées, le KCE propose en premier lieu de mettre à la disposition des acteurs de l’aide et des soins un plan d’action par étapes détaillant les questions à se poser et les attitudes à adopter face à toute situation suspecte.
Le centre d’expertise est même d’avis que la formation professionnelle de tous les intervenants potentiellement en contact avec des personnes âgées devrait systématiquement comporter un module sur la prévention et la lutte contre la maltraitance des personnes âgées. Car le basculement guette : « Les aidants proches, investis dans une relation d’aide, parfois au détriment de leurs propres besoins et de leur équilibre familial et personnel, peuvent progressivement et insidieusement glisser dans une relation où la maltraitance se substitue à l’aide bienveillante (derailed care) ».
Le KCE préconise, en outre, de clarifier les limites du secret professionnel à l’attention de tous les intervenants potentiels et d’encourager ceux-ci à faire appel à des services capables de les aider à évaluer les situations au cas par cas.
La sphère politique a également un rôle à jouer, en dehors des acteurs du terrain. Contrairement à de nombreux autres pays, la Belgique ne s’est pas dotée d’un plan national ou régional spécifique de lutte contre la maltraitance des personnes âgées. La toute fraîche déclaration gouvernementale mentionne bien une intention de lutter contre les violences intrafamiliales, mais le KCE fait remarquer que cela mériterait d’englober aussi l’ensemble des maltraitances à l’égard des personnes âgées (qui ne sont pas toutes intrafamiliales), ponctue-t-il dans son rapport.