Anne Vanderdonckt
Nid vide, nouvelle phase de vie
Anne Vanderdonckt observe la société, ses évolutions, ses progrès, ses incohérences. Partage ses doutes, ses interrogations, ses enthousiasmes. Quand elle se moque, ce n’est jamais que d’elle-même.
Le nid vide, entendez le départ des enfants de la maison, est aussi un incroyable nid à clichés 50+. Lancez-vous dans une recherche photos sur un moteur de recherche et vous tomberez immanquablement sur un nounours solitaire appuyé contre un oreiller et, pire, de mères arrosant de larmes les poils duveteux du pauvre nounours. Comme si la vie s’arrêtait avec le départ de l’enfant. Côtoyant ces images plombantes, d’autres illustrent a contrario et à grand renfort de bras en l’air le « youpie, ils sont enfin partis! ». Or, même en ignorant la notion de famille recomposée, la réalité s’avère bien plus complexe.
Les mères. Primo, lorsqu’on met en scène la tristesse des mères, c’est oublier que le terme papa-poule n’a rien à voir avec des ragots de basse-cour. Les papas, eux-aussi, peuvent avoir le spleen. Comme pourrait en témoigner ce père qui, au grand dam de son épouse, la première nuit du départ, a campé dans sa voiture devant l’appartement de sa fille « pour voir si tout se passait bien ». Secundo, aujourd’hui, les mamans travaillent, ont des loisirs, des amis. Elles n’ont plus comme seule préoccupation leur ménage et leurs enfants et ne voient donc plus tout leur monde s’écrouler au départ du petit dernier. D’autant plus que, Erasmus ou séjours chez un(e) amoureux (se) aidant, il y a déjà eu des avant-goûts de départs.
Si les parents sont de plus en plus nombreux à avouer pousser un ouf lorsqu’ils déménagent la dernière caisse de l’enfant, ils ne fêtent pas non plus l’événement à grand renforts de cotillons. Ils ont élevé leur enfant afin de lui permettre de s’envoler, bien. C’est fait, génial. N’en reste pas moins un petit pincement au coeur. Car, au-delà de l’aspect affectif, c’est aussi un pan de vie sur lequel il faut tourner la page. On assiste à un double passage. Celui de l’enfant qui commence sa vie d’adulte. Et celui des parents qui doivent changer de phase de vie, construire une nouvelle relation avec leurs enfants, avec leur conjoint et avec eux-mêmes.
C’est donc une période de bouleversements durant lequel certains sont confrontés à ce qu’ils avaient pu occulter jusque-là, comme le vide de leur couple, voire de leur vie. Et où chacun est invité à prendre des décisions. Vais-je rester avec lui/elle? Vais enfin m’inscrire sur Tinder? Dois-je habiter plus petit? Comment réaffecter les chambres des enfants? Faut-il leur en garder une? Dois-je continuer ce boulot qui avait pour seul sens de nourrir ma famille?
Enfin, le budget disponible augmente, ce qui va aussi aiguiller les décisions et amener d’autres projets. Et puis, il faudra changer ses habitudes. Tous ceux qui ont cuisiné durant plus de vingt ans pour une famille nombreuse savent à quel point il est difficile de s’adapter à de plus petites quantités. Pour ceux-là, l’expression syndrome du nid vide pourrait être facilement remplacée par syndrome de la petite casserole!
Nid vide... mais attention, il arrive que le nid retrouve ses oisillons. Car, et c’est d’autant plus vrai du fait de la crise, comme des boomerangs, les enfants, ça s’en va et ça revient...
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