Anne Vanderdonckt

Pas de pause pour la ménopause

Anne Vanderdonckt
Anne Vanderdonckt Directrice de la rédaction

Anne Vanderdonckt observe la société, ses évolutions, ses progrès, ses incohérences. Partage ses doutes, ses interrogations, ses enthousiasmes. Quand elle se moque, ce n’est jamais que d’elle-même.

Parmi les innombrables mails qui m’arrivent quotidiennement, celui-ci : « Womanizer, leader du bien-être sexuel féminin, dévoile une nouvelle enquête nationale qui révèle le secret le mieux gardé pour gérer les symptômes de la ménopause : la masturbation. » L’objectif est au final de vendre des sextoys à un marché en extension. Mais peu importe.

Lorsque je suis arrivée chez Plus Magazine, il y a un peu plus de vingt ans, on titrait en couverture « Santé, problèmes au féminin ». Ce qui pouvait signifier beaucoup de choses. Or, il s’agissait là tout simplement de la ménopause qui, effectivement, sous-entend quelques problèmes. Bref, on disait les choses sans le dire, imaginant que les lectrices concernées, qu’on ne souhaitait surtout pas choquer, comprendraient. Peut-être.

Pourquoi tourner autour du pot, surtout quand, comme Plus Magazine, on est spécialiste de la question ? J’ai donc « osé » le mot ménopause en couverture. Les big boss d’alors, pas que des hommes, ont frémi. Les lecteurs/trices n’y ont pas trouvé à redire. Et cette « audace » n’a plus jamais été remise en question.
Il faut dire qu’à l’époque, « ménopausée » était une insulte. Je ne crois pas qu’elle ait totalement disparu mais le politiquement correct interdit au moins désormais de l’écrire.

En un rien de temps, la ménopause a conquis le monde des médias

2024. En un rien de temps, la ménopause a conquis le monde des médias. Magazines, quotidiens, livres (tapez livres+ménopause sur un moteur de recherche et vous obtenez de quoi garnir une bibliothèque complète), podcasts, Instagram, Facebook, pièces de théâtre (Ménopausées, au Poche ; Ménopause, en France…), spectacles d’humoristes (Florence Foresti)… Et même émissions de télé (en Flandre). Tout le monde s’est enfin rendu compte que les 50+ sont de plus en plus nombreux, que ces femmes (ici, on parle de femmes) lisent, achètent, regardent, consomment, qu’elles représentent un nouveau public à conquérir. D’autant plus que celles qui avaient 30 ans il y a vingt ans ont atteint la cinquantaine et n’ont pas l’intention de quitter les spotlights. Or quelle meilleure inspiration que soi-même ?

Il y a toujours eu, dans les domaines qui tournent autour de la santé, des sujets en tête de gondole. Et c’est très bien dans la mesure où certaines personnes trouvent ainsi enfin une explication, voire des solutions, à leurs maux ou leur comportement. Dans le cas de la ménopause, pouvoir identifier un symptôme comme lui étant lié permet d’éviter pas mal d’inquiétudes ou de se lancer dans un circuit médical inadapté.

L’écueil, c’est d’étiqueter un peu trop rapidement « ménopause » tout problème touchant une femme vers la cinquantaine. Un peu comme quand vous avez mal au ventre et qu’on vous dit : c’est le stress. Oui, peut-être. Mais peut-être pas. L’écueil, c’est aussi que cette exceptionnelle ruée économique et médiatique sur la ménopause réduise, dans une société où l’âgisme est encore bien vivant, l’image des femmes de 50+ à une caricature faite de bouffées de chaleur, de sécheresse vaginale et de crises de larmes. Help, on attraperait des vapeurs pour moins que ça !

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