Patrick Bruel : « Je ne suis pas devenu un grand homme »
Il entame une tournée internationale avec son nouvel album Ce soir on sort. Avant ses concerts à Bruxelles, Patriiiiick se confie sur sa vie sous et en dehors des projecteurs...
Dans ce premier album original depuis six ans, l’artiste de 59 ans propose des chansons intimes et d’autres inspirées d’événements comme les attentats de 2015 à Paris, qui donnent le titre à ce disque. Un album que la star de la variété française partagera sur scène avec ses nombreux fans belges dès fin février !
Vous chantez » J’aimerais tout recommencer « . Que recommenceriez-vous dans la vie?
Dans Tout recommencer, il n’y a pas la notion d’effacer ce qu’on a fait et de repartir à zéro. Comme disait Barbara, on ne continue pas sa vie, on la recommence. Ce que j’ai fait m’a beaucoup plu mais si je devais recommencer, j’essayerais autre chose. Avocat, médecin ou chercheur. La médecine m’a toujours fasciné : comprendre, aider, avoir le pouvoir de guérir.
Dans Arrête de sourire, vous dites » Je suis celui qui doute de tout « ...
Globalement, je suis assez anxieux et, oui, je doute, surtout en pleine écriture d’un album où chaque mot est pesé, va compter, va rester. Je me demande si telle ou telle chanson peut intéresser d’autres gens que moi. Mais je crois que tous les créateurs doutent ! J’ai confiance en ce que je sais faire et j’ai conscience de mes limites, de mes lacunes.
A qui faites-vous d’abord écouter vos chansons ?
A mon entourage proche : mes enfants, leur maman, ma mère, mon frère, les filles qui travaillent avec moi au bureau, puis ma maison de disques. Je les écoute, je tiens compte de leur avis et, ensuite, je tranche parce que je ne veux pas en vouloir à ceux qui m’auraient donné un conseil que j’aurais suivi et qui n’était pas bon.
Il y a trente ans, vous chantiez Casser la voix. Avez-vous encore envie de vous la casser ?
Oui, oui ! Je n’ai pas beaucoup changé moi. Je suis un membre de la société civile et quand des choses m’interpellent, me révoltent ou me font sourire, je réagis et ma manière de réagir c’est parfois une guitare, un piano, un micro, des chansons... Comme dans Louise où je dénonce les dérives des réseaux sociaux : le jeu du foulard, de la baleine, Momo... Des défis qui conduisent des mômes au suicide !
Que reste-t-il de la Bruelmania des années 90 ?
Les gens viennent toujours aussi nombreux aux concerts, chantent toujours autant et aussi fort! C’est juste la description qui a un peu évolué : on parle de ferveur et non plus d’hystérie. Tant mieux, je suis content !
Comment expliquez-vous ce succès intact après trente-cinq ans de carrière ?
Je suis cohérent dans mes choix, dans mon travail, dans mon envie de me renouveler, de surprendre, de ne jamais décevoir les gens qui viennent me voir en concert. A côté de ça, il y a une part de chance, que ce que je fais corresponde peut-être à une envie ou un désir, et la chance d’avoir installé quelque chose d’assez durable. Il y a une grande fidélité du public et de moi envers lui.
Vos chansons sont indémodables...
Certaines traversent le temps et sont incontournables en concert. Elles sont rentrées chez les gens et jamais ressorties. Même cet album-ci, qui a un son très actuel, je ne pense pas qu’il se démodera car je n’ai jamais cherché à être à la mode mais bien à prendre les bons costumes pour les bonnes chansons. Des fans disent que c’est mon meilleur album. Ça fait vraiment plaisir ! Parce que les fans sont toujours un peu durs avec les nouveautés comme ils sont très accrochés aux anciennes chansons qui ont marqué le démarrage d’un lien.
Vos places de concert s’arrachent. Que réservez-vous au public belge ?
Les Belges m’ont adopté et jamais lâché, c’est une belle histoire d’amour... Mais ma politique est de ne jamais dire ce que je vais faire parce que sinon je suis obligé de faire ce que j’ai dit, obligé que ce soit bien et si je ne le fais pas, j’ai l’air d’un con ! Donc, il vaut mieux se taire et dire aux gens vous verrez, surprise ! En tout cas, je chanterai les chansons que le public attend comme Alors regarde, Place des grands hommes, J’te l’dis quand même...
On ne parle plus d’hystérie mais de ferveur.
Vous avez déjà dû chanter vos tubes des milliers de fois... Comment encore y prendre plaisir ?
J’aime beaucoup ces chouettes chansons et je réinvente mon spectacle tous les soirs. C’est le théâtre qui apprend ça : quand on joue une pièce tous les jours, c’est toujours comme si c’était la première fois. Un tour de chant, c’est pareil et si je me lassais d’une chanson, je ne la chanterais plus. Tant pis...
Recevez-vous plein de courriers de fans ?
Encore un peu au fan club : on me fait signer des cartes postales ou des photos. A l’époque, il y avait des sacs de lettres, aujourd’hui, il y a beaucoup de messages sur les réseaux sociaux.
Y répondez-vous personnellement ?
Non, sur les réseaux, je ne peux pas répondre à tout le monde. Parfois, je me fais une soirée où je lis les messages et j’y réponds. Puis je vais encore faire des rendez-vous live sur Facebook notamment, un exercice très marrant !
Vous êtes chanteur, acteur, champion de poker, producteur d’huile d’olive en Provence... Tout semble vous réussir !
J’aime me diversifier et je fais les choses à fond. Mais la recherche de l’excellence a un prix, il faut beaucoup bosser. J’ai travaillé, jour et nuit, pendant deux ans sur cet album ! Et recevoir la médaille d’or pour mon huile d’olive (en 2017 et 2018 au concours régional des huiles d’olive, ndlr) a été une belle surprise : elle est de très bonne qualité mais je ne m’y attendais pas ! Ceux qui goûtent notre huile en tombent amoureux et la plupart ne sait même pas que je suis derrière. Pour l’instant, je n’ai plus le temps pour les tournois de poker.
Dans la vie, vous arrive-t-il de mentir ?
Très peu. Mais il peut y avoir des mensonges par omission et des vérités qui ne sont pas toujours bonnes à dire, qui peuvent blesser les gens et ne servent à rien.
Quel genre de père êtes-vous ?
Très présent, un peu un papa-poule. Mais ce n’est pas facile car je jongle entre la France et les Etats-Unis... Là, je vais partir en tournée pendant plus d’un an. Il faudra s’organiser ! Mais mes fils sont très heureux dans leur nouveau pays, ils vivent bien à Los Angeles (avec leur mère Amanda Sthers, ndlr). Quand je suis avec eux, c’est vraiment du temps de qualité. Je suis un père tout ce qu’il y a de plus normal ! On fait beaucoup d’activités ensemble.
Jouer au poker ?
Certainement pas ! Aux échecs notamment.
Des projets, à part cette grande tournée ?
Oui, un film avec Fabrice Luchini, qui s’appelle Le Meilleur reste à venir et qui est réalisé par l’équipe du Prénom. Il sortira en novembre.
Dans votre tube Place des grands hommes, vous donniez rendez-vous dans dix ans à vos copains pour voir si vous étiez devenus des grands hommes... L’êtes-vous devenu ?
Bien sûr que non ! Simone Veil est une grande femme; Jean Moulin, Victor Hugo, Louis Pasteur... des grands hommes. Je suis un artiste qui vit avec son temps, dans l’air du temps, qui, pendant un moment donné, représente quelque chose pour les gens, et qui a, parfois, son mot à dire sur ce qu’il se passe dans la société. Un grand homme, c’est quelqu’un qui laisse une trace importante, qui a changé le cours de l’humanité, qui a trouvé un vaccin...
Vous disiez justement que la médecine vous fascinait... Reste à vous lancer !
Rien n’est perdu ! Ben, tiens voilà, dans dix ans, je serai devenu médecin ! (rires)
Bio express
- 1959 : Naissance en Algérie
- 1989 : Album Alors regarde
- 1998 : Champion du monde de poker
- 2003 : Naissance de son fils Oscar
- 2005 : Naissance de son fils Léon
- 2012 : Comédien dans Le Prénom
- 2015 : Album en hommage à Barbara
- 2016 : Commercialise son huile d’olive
- 2019 : En tournée avec son album Ce soir on sort...
En concert à Forest National, Bruxelles, le 28/2 (complet), le 14/5, le 15/5 (complet) et le 16/5. Aux Francofolies de Spa le 20/7.
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