Refaire sa vie version 2.0: « Repartir à zéro ensemble, n’est-ce pas une belle perspective? »
Passé la cinquantaine, on a souvent besoin d’un coup de main pour réapprendre à faire des rencontres. Mais comment s’y prendre?
Même si les 50+ tirent leur épingle du jeu en matière de technologie numérique, dans la pratique, ils passent rarement des heures à scroller sur des applications de rencontres comme Tinder ou Bumble. C’est que, pour décrocher un rendez-vous, ils ont longtemps tablé sur un heureux hasard lors d’une sortie.
«Or, dans tous les domaines, le monde évolue très rapidement et le dating n’échappe pas à la règle, expliquent Joni Janssens et Kato Ceusters de Ciao Personal Matchmaking. Les 50+ qui cherchent à faire des rencontres sont généralement en quête de ce que nous appelons un second amour. Elles se sont retrouvées seules après le décès de leur partenaire ou ont vu leur mariage se déliter. Ce premier partenaire était souvent un amour de jeunesse rencontré pendant les études ou lors d’une sortie. Aujourd’hui, elles sont confrontées à un monde du dating dont les premiers pas s’effectuent souvent sur internet. Et elles sont peu à l’aise avec cette approche.»
«Tout dépend de ce qu’on entend par online dating, estime Christel De Jonghe, midlife coach. Moi-même, je n’étais plus très jeune lorsque j’ai commencé à chercher un nouveau partenaire. Mon mari et père de mon fils est décédé brutalement à 37 ans. Ce n’est que plus de dix ans après que j’ai commencé à m’intéresser aux sites de rencontres. Un jour, le profil de Dirk a attiré mon attention. Un profil sans photo, car Tinder et consorts n’existaient pas à l’époque. Pendant longtemps, nous nous sommes envoyés de nombreux messages écrits, avant que Dirk ne suggère de passer au téléphone. J’ai trouvé cela très excitant, car une voix peut tout aussi bien vous séduire que vous rebuter.»
Voilà seize ans que Christel et Dirk vivent une belle histoire. La morale que Christel tire de cette expérience est celle de la patience, de la persévérance et, surtout, de la conviction qu’on a soi-même des choses à offrir à l’autre.
Laisser son bagage à la maison
«Bien sûr, le corps change avec l’âge. Vous avez peut-être pris quelques kilos, vous avez une cicatrice ici ou là et la peau n’est plus aussi rebondie. Mais peu importe car cela vaut pour les deux sexes. Le plus important est ailleurs: vous êtes riche d’une solide expérience de vie. À 20 ans, un couple parle surtout de ses rêves et de ses projets d’avenir. Mais lorsqu’on fréquente une personne plus mûre, on voit immédiatement ce qu’elle est devenue. Toutefois, même à un âge plus avancé, je pense qu’il faut éviter de se précipiter et se laisser le temps. Dirk et moi avons commencé à nous envoyer des messages sans avoir vu de photo de l’autre, puis nous nous sommes téléphoné quelque temps avant la rencontre physique. L’avantage? Lors de la première rencontre, vous avez le sentiment de bien connaître l’autre et vous faites plus facilement le tri entre les sentiments qui vous traversent. Cela procure une certaine tranquillité d’esprit.»
«C’est parce que nous avons déjà fait une première sélection à leur place que nous offrons à nos clients cette tranquillité d’esprit, explique Joni Janssens. Ceux qui se rencontrent à un moment plus tardif de leur vie ont souvent des exigences spécifiques. Par exemple, ils recherchent un partenaire prêt à déménager parce qu’il ou elle ne veut pas quitter la maison pour laquelle il ou elle s’est tant battu(e) après le divorce. Ou parce qu’il ou elle veut rester près de ses enfants et petits-enfants. Il est aussi fréquent que les personnes ne ressentent plus le besoin de vivre constamment ensemble et optent pour une relation LAT (de l’anglais Living Apart Together, ou vivre ensemble séparément). Inutile de préciser que le nouveau partenaire potentiel doit être d’accord. Avant de leur proposer une première rencontre, nous discutons toujours de ces questions avec les deux personnes. En les réglant en amont, nous leur permettons de profiter davantage de ce moment privilégié.» Car, bien sûr, il est avant tout question de plaisir. Les rendez-vous doivent être des moments joyeux et détendus.
«Si vous allez à chaque rendez-vous avec la conviction que vous allez rencontrer l’homme ou la femme de votre vie, vous risquez fort d’être déçu, analyse Kato Ceusters. Détendez-vous et faites en sorte de passer au moins une soirée agréable dont vous vous souviendrez avec plaisir.»
«C’est pourquoi je dis toujours: laissez momentanément votre bagage à la maison, ajoute Christel De Jonghe. Lors d’un premier rendez-vous, ne saoûlez pas votre date avec vos échecs passés au risque d’en arriver rapidement à une surenchère de malheurs. L’un peut avoir eu de graves problèmes de santé, l’autre un divorce conflictuel, chacun a vécu des épreuves plus ou moins douloureuses. Ce sont des conversations que vous pourrez avoir plus tard. Soyez dans l’instant: vous êtes face à quelqu’un avec qui vous allez peut-être construire un avenir. À ce moment précis, le passé n’a plus d’importance. Repartir à zéro ensemble, n’est-ce pas une belle perspective?»
Joni Janssens et Kato Ceusters abondent dans le même sens. «Si dès la première rencontre votre interlocuteur se plaint de son ancienne relation – pas assez sociable, nul en cuisine, libido en berne – il y a de quoi être rebuté. C’est comme si on vous disait ce que vous allez devoir faire ou éviter de faire.»
Un bon coup de pied aux fesses
La grande question des rencontres après 50 ans est finalement celle qu’on se pose à tout âge: comment gérer les déceptions? Si une succession de premières rencontres se soldent à chaque fois par une désillusion, on peut perdre confiance en soi. Les hommes sont-ils différents des femmes à cet égard ou s’agit-il seulement d’une perception?
«Ce n’est qu’une simple perception, avance Christel De Jonghe. Je constate que les hommes sont plus enclins à abandonner la recherche ou même à ne pas la commencer du tout. Ils se disent qu’ils peuvent tout aussi bien regarder un bon film seul, préparer leurs repas au micro-ondes et appeler quelqu’un s’ils ont envie de faire l’amour. D’un autre côté, j’entends souvent des femmes dire «tous les hommes bien sont pris» ou «une fois qu’ils ont passé la cinquantaine, ils veulent des femmes plus jeunes». C’est absurde. Tout comme imaginer que le partenaire que vous espérez croisera de toute façon votre chemin. Donnez-vous un bon coup de pied aux fesses et lancez-vous dans de nouvelles activités, comme découvrir un nouveau sport ou suivre des cours du soir par exemple.»
«L’un des principaux problèmes des personnes qui cherchent un nouveau partenaire est qu’elles sont coincées dans leurs habitudes, souligne Joni Janssens. Elles ont le même cercle d’amis et les mêmes collègues depuis des années. Apprendre à connaître quelqu’un de nouveau devient difficile. Le bon conseil? Sortir de sa zone de confort et savoir par soi-même ce que l’on a à offrir à l’autre».
«C’est seulement quand on a de l’amour à donner qu’on en reçoit en retour et c’est la plus belle chose qui soit. Il y aura encore tant de bons moments à partager pendant les prochaines années… Foncez! «conclut Christel De Jonghe avec enthousiasme.
Les jeunes abandonnent Tinder
Le nombre d’utilisateurs d’applications de rencontres comme Tinder a diminué ces dernières années, surtout chez les jeunes. Une étude menée auprès d’étudiants américains montre que 79% d’entre eux n’utilisent plus du tout les applications de rencontres, contre 50% en 2019.
En Belgique, le tableau est identique. Tinder est encore souvent éléchargé (2,4 millions de fois en 2023), mais le temps que les utilisateurs y passent ne cesse de diminuer. Alors que les Belges en quête d’amour passaient encore 13,5 millions d’heures à étudier des profils en 2020 – en pleine période de covid -, ce chiffre a chuté à 10,7 millions d’heures en 2023. En outre, les utilisateurs sont de moins en moins prêts à payer pour obtenir des versions complètes des applications.
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