Rencontre avec l’ex-championne de tennis Dominique Monami: « Rendre au sport ce qu’il m’a donné »
A 50 ans, l’ex-championne de tennis a quasi rangé sa raquette mais pas son énergie! Elle performe sur le terrain du coaching mental et d’organisations sportives.
Quelle joueuse belge de tennis s’est hissée la première dans le top 10 mondial? Dominique Monami. Qui a décroché la première médaille olympique pour le tennis belge? Elle aussi. Qui est la première femme à la vice-présidence du Comité olympique et interfédéral belge (COIB)? Eh oui, toujours elle. La Verviétoise d’origine nous reçoit à sa maison, près de Malines. Avec son sourire communicatif, elle évoque son passionnant parcours.
Il y a vingt-cinq ans, vous marquiez l’histoire belge en devenant 9e tenniswoman mondiale. Désormais, dans un livre et lors de coachings et conférences, vous prodiguez des conseils pour booster notre énergie.
Oui, après ma retraite sportive, un ami m’a proposé de travailler dans sa société de coaching en entreprise. J’ai trouvé intéressant d’aider les gens à travers mon expertise de sportive de haut niveau car il y a beaucoup de parallèles entre ce que j’ai vécu sur le terrain et le milieu des affaires. J’ai suivi des formations avant de m’orienter vers le bien-être au travail. Je donne des conférences, des ateliers et je fais aussi du coaching individuel. J’adore ça!
Avez-vous des 50+ en coaching?
Oui, ils viennent pour des soucis de stress et burn-out. Ils n’ont plus d’énergie et veulent retrouver un certain équilibre. On analyse ensemble les fondations importantes pour reconstruire au fur et à mesure une maison... L’objectif est que mes clients retrouvent confiance en eux, se sentent bien pour prendre les bonnes décisions, pour reprendre le travail ou se réorienter professionnellement si nécessaire... A plus de 50 ans, il y a en effet la crainte d’être licencié quand on reprend le travail.
Que faire pour booster l’énergie?
Il y a l’exercice des deux colonnes: mettre sur papier ce qui donne et coûte de l’énergie pour voir où agir. Les fondamentaux sont la nutrition, le sommeil, l’activité physique. Avec le télétravail, on bouge encore moins qu’avant. On pense être plus efficace en travaillant de la maison mais c’est faux car on fait un sprint du matin au soir sans pauses, sans se déconnecter de l’ordinateur et des réseaux sociaux. C’est très fatigant pour le cerveau! Il faut prévoir des moments de réunion avec soi-même: 10 minutes le matin, 10 après le repas et 10 l’après-midi. Des instants où on s’oblige à bouger pour se vider la tête. Un sportif a aussi besoin de moments de récupération...
Je joue pour faire plaisir aux amis. Dominique Monami
Vous restez malgré tout fort impliquée dans le sport...
Oui, ma mission est de rendre au sport ce qu’il m’a donné. Je suis impliquée au COIB, où je suis la première femme vice-présidente. Je suis sortie de ma zone de confort car je préfère rester dans l’ombre et je suis plutôt très humble par rapport à ma carrière. C’est une bonne chose pour inspirer d’autres femmes, dans le milieu du sport, à prendre des postes à responsabilités et surtout montrer que c’est possible!
Au COIB, je suis également active dans une commission d’égalité des genres dans le sport, où je crée des événements (colloques, ateliers...) axés sur la manière d’augmenter le nombre de femmes dans l’univers du sport au niveau des conseils d’administration, des arbitres, des coachs, etc.
J’essaie aussi de renforcer les synergies entre les comités olympique et paralympique. Dans ce dernier, je suis membre de la commission de sélection des joueurs. Je m’implique également dans la Ligue Handisport francophone où je participe aux décisions pour professionnaliser les sportifs. Enfin, j’accompagne les sportifs en fin de carrière au sein de l’organisation Sport Vlaanderen.
Avez-vous songé à un come-back?
Pas du tout! J’ai fait dix ans de sport haut niveau sans interruption, c’est intense... J’ai réalisé tous les objectifs que je m’étais fixés. Puis, je commençais à fatiguer mentalement, la pression devenait difficile à gérer et je perdais la notion de plaisir. J’ai préféré arrêter quand j’étais encore avec un état d’esprit positif... J’étais au sommet, dans le top 10. Je ne voulais pas redescendre au classement et être malheureuse. J’ai aussi perdu ma maman en 2000 ce qui m’a fait beaucoup réfléchir au fait qu’il y a autre chose que le tennis dans la vie et je voulais être mère avant mes 30 ans.
Votre plus beau souvenir?
Quand je regarde les tournois auxquels j’ai participé comme Roland Garros ou encore Wimbledon, le plus mythique à mes yeux, je me remets dans l’atmosphère de mes quarts de finale, finales... Mais j’ai préféré les JO de Sydney, en 2000! (Elle sort délicatement sa médaille de bronze de son écrin) Quelle fierté de jouer pour mon pays, car je suis très nationaliste, et de monter sur le podium avec cette médaille. Il y a peu, je suis allée à Sydney, avec mon mari, pour revoir le stade olympique. En une fois tous les souvenirs sont revenus et j’ai commencé à pleurer!
Jouez-vous encore au tennis?
Le tennis reste ma passion: je regarde les tournois, je commente des matchs à la télévision, j’ai une chronique dans La DH... Je n’ai pas eu de grosses blessures mais je ne lâchais jamais rien même si je devais mourir sur le court. Depuis, j’ai des problèmes au dos, aux hanches... Je jouerais encore au tennis sans cette usure physique importante. Les rotations, les chocs, les déplacements rapides me font souffrir. Sur le terrain, ma tête pense pouvoir aller chercher la balle qui arrive mais mon corps reste sur place, donc ce n’est pas évident! (rires)
Je joue parfois avec des amis et ma soeur mais ils n’ont pas un niveau très élevé. C’est plus pour leur faire plaisir! Je leur envoie des belles balles dans la raquette et, du coup, ils ont toujours l’impression de bien jouer. Affronter quelqu’un de mon niveau me ferait mal car je devrais forcer physiquement...
Montez-vous sur le terrain avec d’autres sportives?
J’ai joué avec les athlètes Tia Hellebaut et Kim Gevaert, la cycliste Annelies Dom... Aussi avec Sabine Appelmans car on est de la même génération tennistique: on faisait des matchs d’exhibition jusqu’à ce qu’on se perde un peu de vue avec le corona.
Vous êtes-vous fait des amies sur le circuit?
Etant super émotionnelle, je gardais toujours une certaine distance car il m’était trop difficile de jouer contre une joueuse devenue copine. Mais j’avais des très bons contacts avec plein de joueuses comme Arantxa Sánchez et Martina Hingis. On continue à se suivre surtout via les réseaux sociaux. Comme amie, j’ai Els Callens, ma partenaire de double aux JO.
Que pensez-vous de la génération tennistique actuelle?
Eh bien, je préfère appartenir à la génération d’avant Kim Clijsters et Justine Henin plutôt qu’à celle d’après! Les joueuses suivantes seront toujours comparées et ne seront jamais assez bien car on a connu le summum avec elles deux. Depuis, on a eu quelques bonnes joueuses proches du top 10. Pour moi, Elise Mertens est la joueuse, encore sur le circuit, qui a été la plus constante après Kim, Justine et moi-même. Côté masculin, David Goffin est malheureusement redescendu au classement mais c’est formidable qu’il soit resté autant d’années parmi les meilleurs joueurs au monde. Je suis aussi contente d’avoir appartenu à la génération d’avant les réseaux sociaux. Il m’aurait été très compliqué de subir les critiques, insultes ou encore menaces de mort car, aujourd’hui, il y a des paris sur les joueurs. Je constate aussi une belle évolution au niveau mental. Les joueurs commencent à parler de la difficulté à gérer la pression. Avant, c’était tabou! Montrer ses problèmes était perçu comme un signe de faiblesse.
A 50 ans, je suis sereine car je ne dois plus rien prouver. Dominique Monami
Votre fille de 22 ans est-elle adepte de la balle jaune?
Ines joue de temps en temps avec des amis à l’université où elle étudie la médecine. Mon père était aussi médecin. Elle a un niveau débutant, comme mon mari. Je n’ai jamais voulu la pousser car c’est un vrai cauchemar d’être « la fille de ». Lors des compétitions interclubs, elle était étiquetée « fille de ». C’était son hobby, sans plus... Mais on rigole parfois en disant qu’elle est la plus jeune médaillée olympique de l’histoire puisqu’Ines était dans mon ventre quand j’étais aux JO! (rires)
Et vous, quels sont vos loisirs?
J’adore cuisiner: j’ai suivi une formation et obtenu un diplôme de sous-chef. Une passion depuis toute petite car ma maman cuisinait super bien. Puis, le golf. Je fais des compétitions en interclubs et j’ai déjà gagné une poignée de matchs cette année. Tout le monde peut pratiquer ce sport, peu importe le niveau, dans un environnement super relaxant, dans la nature... Un vrai moment de déconnexion. C’est chouette!
Vous venez d’avoir 50 ans! ça représente quoi?
Un choc psychologique! (rires) C’est quand même un demi-siècle... En même temps, je réalise que je ne dois plus rien prouver, je suis beaucoup plus sereine, je ne fais que ce que j’aime, j’ose dire quand quelque chose ne me plaît pas. Je me sens pleinement en harmonie, en fait! Je profite de la vie et je vais voyager un peu plus. D’ailleurs, je pars en safari en Afrique du Sud avec ma famille ce mois de juillet pour mon anniversaire. Pour fêter ce cap, j’ai aussi prévu une compétition de golf avec mes amis dont Jean-Michel Saive.
Y a-t-il encore un match à gagner dans votre vie?
Non, j’espère juste que ma fille réalise son rêve de devenir gynécologue. Je suis à 100% derrière elle comme mes parents l’étaient derrière moi. Puis, je veux continuer d’inspirer les gens, les énergiser à travers mes conférences et mes coachings. Plus j’aiderai de monde à se sentir mieux, plus ma mission sera réussie.
Dominique Monami
- 31/5/1973: Naissance à Verviers
- 1981: Tape ses premières balles
- 1998: Première Belge dans le top 10 mondial
- 2000: Médaille de bronze en double avec Els Callens aux JO
- Fin 2000: Retraite sportive
- 2001: Naissance de sa fille Ines
- 2006: Epouse Erik Vink
- 2016-2018: Coache l’équipe belge en Fed Cup
- Depuis 2021: Vice-présidente du COIB
- Fin 2022: Livre « Boostez votre énergie » (éd. Kennes)
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