Rencontre avec Stéphane Bern : « Le patrimoine, ma raison de vivre ! »
Ses surnoms sont Monsieur Royauté, Monsieur Histoire, Monsieur Patrimoine. Derrière ces titres sérieux, un passionné plein d’humour !
Son héros à 12 ans ? Le roi Juan Carlos pour avoir restauré la démocratie en Espagne. Son activité à 17 ans ? Accueillir les visiteurs au château de Versailles. Aujourd’hui, Stéphane Bern, figure incontournable du paysage audiovisuel français, s’invite dans nos salons avec, notamment, son émission télévisée phare » Secrets d’Histoire « . Coup de projecteur sur ses secrets à lui, son histoire à lui, ses relations avec le royaume belge, ses livres pour l’été...
Comment est venue l’idée du livre » Les records de l’Histoire » ?
Il s’agissait de profiter des Jeux Olympiques, entre-temps reportés, pour raconter des histoires courtes, des anecdotes : la guerre la plus longue, le règne le plus court, le plus grand château du monde, la femme la plus rapide, l’opéra le plus joué... Cent records, variés, allant de l’Egypte ancienne à l’époque contemporaine. L’objectif est de laisser le lecteur picorer au gré de ses envies et de ces records qui m’ont tous un peu amusé ! Par ailleurs, je sors » Mon cahier de vacances Secrets d’Histoire « , des jeux ludiques de révision, pour toute la famille, avec des erreurs à chercher dans des photos, des mots fléchés...
Et vous, détenez-vous un record ?
Je ne crois pas... Je fais partie de ceux qui ont obtenu le permis de conduire au bout de la 4e fois ! (rires) Mais depuis, on ne me l’a jamais retiré, je touche du bois. J’aurais aimé briller par quelque aspect que ce soit, hélas je n’ai jamais brillé vraiment... J’essaye de concourir pour le record de celui qui a le plus d’autodérision !
D’où vient votre passion pour la monarchie ?
Je suis Français et Luxembourgeois de par mes grands- parents maternels, et quand on est Luxembourgeois, on est pour notre famille grand-ducale ! Je passais toujours mes vacances chez eux et mon grand-père m’envoyait très souvent des cartes postales avec des photos de la famille grand- ducale. Il y a donc eu un phénomène d’identification même si je faisais la différence avec ma propre famille, hein ! Je n’ai pas de sang bleu, je me sens vraiment un gueux qui appartient au peuple. Mais je me suis approprié cette famille grand-ducale que j’aime... Mes grands-parents m’ont aussi donné le goût de l’Histoire. De même que mes parents en m’emmenant en voyage et dans les musées.
Je me sens un gueux qui appartient au peuple « .
Quel genre d’enfant étiez-vous ?
Très turbulent, indiscipliné, rebelle et assez drôle. Quand mes parents me disputaient ou me punissaient j’arrivais toujours à les faire rire, donc la forteresse cédait et ça finissait plutôt bien ! Dès mes 10 ans, je lisais des biographies et les récits historiques me fascinaient. J’écoutais la radio en permanence puis je faisais des comptes-rendus. J’ai toujours aimé raconter des histoires et les rendre accessibles, c’est-à-dire être pédagogue, un transmetteur. Je ne suis pas historien mais raconteur d’histoires.
Vous êtes pourtant diplômé en commerce...
J’ai voulu faire plaisir à mes parents en faisant de brillantes études mais après je suis reparti de zéro, à la base, comme journaliste pigiste, en mangeant des pâtes, alors que j’aurais pu briguer un poste de directeur marketing ou je ne sais pas quoi. Ni remords, ni regrets. Les économies ne m’ont mené à rien et surtout pas à en faire ! (rires)
Votre émission » Secrets d’Histoire « , lancée en 2007, marche toujours bien. Comment l’expliquez-vous ?
Les gens ont besoin de repères. Si vous voulez conduire tranquillement il faut bien, de temps en temps, regarder dans le rétroviseur. L’Histoire vous donne un recul, une expérience. Aujourd’hui, les gens sont dans l’immédiateté de tout savoir tout de suite, de réagir à chaud sur les réseaux sociaux en envoyant des photos de leur assiette, leur panier de courses, etc. ça les rend plus heureux ? J’ai eu la chance de rencontrer des personnes qui ont connu la guerre de 14-18, j’écoute les derniers résistants de la Seconde Guerre... Ma façon d’être, c’est d’écouter les aînés et d’en faire mon miel parce qu’ils vous tendent un relais. L’Histoire nous aide à nous construire.
Depuis 2017, vous êtes chargé de mission par le président Macron pour la sauvegarde du patrimoine. C’est-à-dire ?
Cela consiste à recenser tout le patrimoine en péril et ensuite à trouver des solutions pour le restaurer. On a lancé pas mal de campagnes et surtout le » Loto du patrimoine » visant à financer la rénovation de monuments. Il nous a permis de récolter 50 millions d’euros la première année ! Le patrimoine, c’est l’héritage du passé, il crée du lien entre les générations, de la convivialité et du dynamisme économique dans les villages, c’est un facteur d’égalité entre les villes et les campagnes parce qu’il y a autant de patrimoine dans les villes que dans les communes de moins de 2.000 habitants. On a une responsabilité vis-à-vis de ceux qui nous ont précédés.
Votre plus grande fierté ?
Avoir déjà sauvé 150 monuments avec la Mission Bern et fait du patrimoine un sujet d’intérêt général. Les Français sont très attachés à leur patrimoine. Les Belges aussi m’appellent à la rescousse quand on veut démolir un monument, comme le pont médiéval de Tournai l’an dernier.
Vous êtes le super-héros du patrimoine !
J’essaye de l’être ! (rires) C’est une grande responsabilité. Les émissions de télé, de radio... Il ne restera rien de tout ce qu’on fait. Seuls resteront les monuments qu’on aura sauvés car, maintenant, ils sont en bon état pour au moins trois siècles. Faire quelque chose dans la durée, pour les générations futures, donne vraiment un sens à ma vie.
Vous habitez un ancien collège royal et militaire (XVIIe s.), dans le Perche, un monument que vous avez sauvé en 2013 !
Oui, avec le confinement, ma maison de campagne à Thiron-Gardais est devenue ma maison principale ! J’ai mes chiens, mes poules qui me donnent des oeufs, je vois les arbres pousser... C’est merveilleux ! Une partie du domaine se visite : le jardin et les anciennes salles de classe que j’ai transformées en musée dédié au site, avec des objets historiques, des tableaux, des documents racontant l’histoire des collèges royaux et militaires de France.
On vous voit souvent devant des châteaux, auriez-vous préféré en habiter un ?
Pas du tout ! Je n’ai aucun fantasme nobiliaire. C’est plus dans mon tempérament d’habiter un collège où on est davantage dans la transmission que dans la possession. On est dans l’éducation, j’essaie de transmettre le goût de l’histoire et l’amour du patrimoine. Mes deux rêves, ma mission sur terre sans aucun doute...
Auriez-vous voulu vivre à une autre époque ?
Je suis très content de vivre au XXIe siècle même si on vit une époque un peu étrange... Quand j’ai mal à une dent, le dentiste me la soigne plutôt que de me l’arracher ! (rires)
Et si vous aviez été roi ?
Non, régner, c’est beaucoup de responsabilités et j’en ai déjà assez. Un monarque que j’admire, c’est le roi Philippe, un homme remarquable, très intelligent et cultivé. Je le dis parce que les Belges ne s’en rendent pas compte ! Alors... il n’est pas très causant, mais il ne parle jamais pour ne rien dire. ça me frappe ! On ne doit pas découvrir la couronne mais j’ai eu la chance de le rencontrer à plusieurs reprises et il est d’une humanité incroyable, d’une gentillesse extraordinaire. La reine Mathilde est brillante, elle connaît tout sur tout, elle est imbattable en histoire, j’ai intérêt à réviser quand je la vois. Je suis scotché ! La monarchie est une clé de voûte de la Belgique. Cet élément paraît purement décoratif mais si on l’enlève, l’édifice s’effondre...
Des projets en Belgique ?
Je vais tourner une émission » Secrets d’Histoire « , à Bruxelles notamment, consacrée à la reine Elisabeth. Je vais souvent dans la capitale. Et quand j’arrive sur la Grand-Place... Waouw, ce lieu magique me donne la chair de poule. J’ai plein d’amis fidèles en Belgique. Les Belges, ce sont des Français qui ne se prennent pas au sérieux ! Je ne me prends vraiment pas au sérieux, non plus, dans la vie. Des gens pensent parfois que je suis ceux dont j’ai pu parler à la télévision et j’ai ce phrasé particulier qui fait qu’on me croit coincé, mais je ne le suis pas du tout !
Stephane Bern
1963 : Naissance à Lyon
1985-1987 : Rédacteur en chef du magazine » Dynastie »
1998-2003 : Emission télé » Sagas »
2000-2011 : Emission radio » Le fou du roi »
Depuis 2007 : Emission télé » Secrets d’Histoire »
Depuis 2011 : Emission radio » A la bonne heure »
Depuis 2017 : Chargé de mission pour le patrimoine
2020 : » Les records de l’Histoire « , » Mon cahier de vacances Secrets d’Histoire » (Albin Michel)
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