Anne Vanderdonckt

Un chiot dans un paquet cadeau

Anne Vanderdonckt
Anne Vanderdonckt Directrice de la rédaction

Anne Vanderdonckt observe la société, ses évolutions, ses progrès, ses incohérences. Partage ses doutes, ses interrogations, ses enthousiasmes. Quand elle se moque, ce n’est jamais que d’elle-même.

Le seul réseau social que je suive, c’est Instagram. Pour son côté inspirant. Un jour, j’ai dû m’arrêter sur autre chose que des looks et des vêtements et, hélas, cette chose devait être une photo mignonne de chiot. Le logiciel, sachant maintenant qu’en plus des fringues de tout poil, j’adore aussi les canidés, m’envoie donc, suivant les chaussures de saison et précédant les sacs d’entre-saison, des teckels, des boxers, des dalmatiens, des cockers, des jack russell, des saint-bernard ou des chihuahua… soit un complément animé du grand Larousse des chiens. Avec une légère obsession pour les labradors dorés. Bébés.

Je ne voudrais pas avoir l’air de me chercher des excuses, mais qui faut-il être pour ne pas craquer et cliquer ? Et activer le système. Recevoir encore plus de bébés labrador. Bah, me dis-je avec une indulgence dont je ne ferais pas crédit à un enfant, s’attendrir une fois par jour devant des chiots qui se roulent dans les flaques (de boue), ce n’est pas encore ça qui va me ramollir tout à fait le cerveau. J’assume !

L’affaire a pourtant commencé à solidement m’énerver durant les fêtes de fin d’année, avec de petits films toujours bâtis de la même manière. Madame/Monsieur/la grand-mère/les enfants sont assis dans le canapé du salon/de leur chambre/dans la cuisine. Arrive une personne de la famille/un ami/un amoureux avec un gros paquet cadeau garni d’un immense nœud aux imprimés de Noël. Le destinataire s’en empare, fébrile, et libère un chiot (souvent un bébé labrador doré, parfois lui-même décoré d’un nœud de Noël). L’heureux bénéficiaire pleure d’émotion, parfois, hystérique, jusqu’aux hoquets incontrôlables. Tout le monde y va de sa larme ; c’est le bonheur. Idem à la fête des mères, des pères, etc. Une déferlante.

Un chien n’est pas un mixeur-batteur qu’on peut retourner au magasin si la couleur ne plaît pas.

Ma première réflexion, c’est : pauvre petite bête qui a dû quitter sa maman et son environnement familier pour être secouée dans une boîte toute noire et accueillie par des hurlements. La deuxième, c’est : non, on n’offre pas un chien ou tout autre animal en cadeau, même à celui qui en a marqué l’envie. Un chien, c’est une responsabilité et un engagement pour la vie (la sienne, qui dure plus de dix ans). Et ça se choisit tout comme il vous choisit. Ce n’est pas un mixeur-batteur qu’on peut retourner au magasin si la couleur ne vous plaît pas.

Ma troisième pensée, c’est : après les fêtes de Noël, nous voilà vite aux vacances de Pâques (quelle que soit leur nouvelle dénomination), puis aux vacances d’été. Le chiot a grandi. En secouant la queue, il a précipité un vase par terre. Le vétérinaire et sa nourriture coûtent un bras. Il faut le sortir, même quand il pleut. Et la location de vacances n’accepte pas les chiens. C’est là que ça craque. Et qu’on retrouve le « chiot cadeau » dans un refuge ou « oublié » sur une aire d’autoroute. Alors, les chiens cadeaux, c’est niet !

Sauf que j’aurais presque envie de faire une exception pour M., 84 ans, qui a été jugée « trop vieille » par un refuge pour adopter un chat. « Car elle peut décéder à tout moment ». Ce qui est le cas de nous tous, ceci dit. L’argument selon lequel sa fille s’occuperait du chat n’a eu aucun poids. Chienne de vie ! ●

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